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voisinage est plus travaillée, plus fumée & plus arrosée que celle qui environne le pied de l’arbre.

La tendance naturelle du prunier à fourmiller de racines traçantes, devroit engager les pépiniéristes à ne greffer les arbres à noyaux que sur eux-mêmes, ou sur amandier, ou sur abricotier : cependant si l’arbre doit être planté dans une terre dont la couche inférieure soit habituellement trop humide, c’est le cas, & je crois le seul, où il convienne de planter le pêcher greffé sur prunier.

Écoutons encore ce que dit M. de la Ville-Hervé sur la plantation du pêcher. « On doit laisser toujours un pied de distance entre le mur & l’arbre. L’usage de planter le pêcher perpendiculairement à la muraille, a été reconnu nuisible, & on commence à se réformer à cet égard, en l’avançant de quelques pouces ; mais ce n’est point assez, à moins que la muraille ayant peu de fondemens, les racines ne trouvent au-dessous suffisamment de terre pour s’étendre. Voici mes raisons sur cette façon de planter à un pied du mur ; 1°. le soleil qui darde à plomb sur la souche & sur les racines du pêcher, les empêche de ressentir les faveurs des influences du ciel, des pluies & des rosées. Qu’après de fortes pluies on fouille au pied de ces arbres, on trouvera que la terre n’est point du tout humectée : quand même elle pourroit l’être, le moindre rayon du soleil l’auroit bientôt desséchée. »

» 2°. Tout le monde sait que lorsqu’un arbre est planté, la première action qui se passe dans son intérieur est de former & de darder de toutes parts, à travers les pores de la terre, de petits filets blancs au bout & autour de ces racines que l’on nomme chevelu. Ces filets sont extrêmement tendres & cassans. Lors donc qu’ils rencontrent les pierres du mur & ses fondemens, il faut nécessairement qu’ils rebroussent chemin comme ceux des plantes renfermées dans des pots ou dans des caisses : à leur défaut, les racines du devant & des côtés sont obligées d’y suppléer ; mais elles ne sont guères plus à leur aise, comme on va le voir. »

» 3°. Le sentier qui règne d’un bout à l’autre de l’espalier, afin de travailler aux arbres, est perpétuellement foulé aux pieds : il se durcit & devient impénétrable aux pluies & à l’humidité, du moins en été. Dans cette saison, ce sentier est fendu de tous côtés, sur-tout dans les terres fortes ; & au moyen des gerçures les racines sont pour ainsi dire à jour, & le peu d’humidité est desséchée par les vents, le hâle & les rayons du soleil. »

» 4°. Les mulots & les souris des champs établissent leur demeure dans le pied des murs à travers les racines de ces arbres ; leur accroissement & leur santé ne reçoivent pas peu de dommage des différens passages que ces animaux y pratiquent. »

» 5°. La tige de l’arbre ainsi appliquée au mur, doit être brûlée dans les chaleurs immodérées qui interceptent la circulation de la sève, & en dissipent une grande partie. La sève ne pouvant plus trouver passage par le devant qui est desséché, monte & descend par le derrière de l’arbre du côté où il est appliqué au mur. Le mécanisme de la végétation devient imparfait dès que les parties qui doivent y concourir n’agissent plus de concert ; enfin, celle qui fait seule les fonctions des autres doit