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entre chaque plante que l’espace nécessaire, afin de ne pas trop en diminuer le nombre.

Au moment de la récolte, le propriétaire arrive sur son champ, suivi de tous les valets, femmes & enfans de la métairie, qui apportent avec eux des draps en nombre proportionné à celui des pavots. Commençant par un bout du champ, on étend un drap au pied des plantes, on les incline, on les secoue sur ce drap, afin de faire tomber dessus toute la graine qui est mûre ; après cette première opération, un valet arrache la plante de terre, & il observe de la tenir toujours très-droite, afin qu’il ne tombe aucune graine. De plusieurs plantes réunies, il en forme des faisceaux & les place droits sur le champ, appuyés les uns contre les autres. Deux ou trois jours après la récolte entière, on étend de nouveau des draps aux pieds des faisceaux accumulés, & sur ces draps on secoue de nouveau les têtes, & on brise les capsules ; enfin la métairie suffisamment fournie de bois pour le chauffage, de bois pour le service du four, on met le feu aux faisceaux.

Quelques propriétaires, afin de hâter la récolte, inclinent les tiges sur les draps, en coupent les sommités, & les emportent à la métairie. Les tiges restent sur le champ, & le feu les réduit bientôt en cendres, si on n’aime mieux les arracher, les emporter & les conserver pour la litière du bétail.

De quelque manière qu’on fasse la récolte, le point essentiel est d’empêcher qu’il ne reste aucun débris de la capsule, mêlée avec la graine ; parce que, portés au moulin, ils absorberoient en pure perte une quantité d’huile assez considérable ; afin de prévenir cet inconvénient, on se sert de cribles percés de petits trous, qui permettent a la graine de passer, & les débris restent dans le crible.

La graine de pavot demande les mêmes soins pour la conservation & pour l’empêcher de fermenter, que celle de colsat, (consultez ce mot) & on la porte au moulin dès qu’elle est sèche.

II. De la culture du pavot blanc. Elle ne diffère pas de celle du pavot des champs ; on s’y est adonné dans quelques-unes de nos provinces méridionales, non dans la vue d’en retirer de l’huile, mais uniquement afin d’en recueillir les têtes & y conserver la graine. Les cultivateurs n’attendent pus que les têtes soient complettement mures ; ils les coupent un peu avant que s’ouvrent les soupapes placées au dessous de la couronne, & par lesquelles les graines s’échapperoient. On assemble plusieurs têtes auxquelles on a laissé trois ou quatre pouces de tiges, afin de pouvoir les lier & les suspendre facilement dans un lieu à l’ombre & exposées à un grand courant d’air. Lorsque leur dessiccation est complette, lorsque la coque a acquis une couleur d’un blanc sale, tous les paquets sont rangés & renfermés dans des caisses. C’est ainsi qu’ils sont expédiés en foire de Beaucaire, & qu’ils y sont vendus comme pavots blancs du Levant. Cet accessoire du commerce ne laisse pas d’être considérable.