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Le pain de seigle bien fabriqué n’est pas lourd ; il a assez de goût pour n’avoir besoin d’aucun assaisonnement étranger ; il se conserve sans presque rien perdre des qualités qu’il a dans sa nouveauté.


Article III.

Du pain de méteil.

Les sentimens ne sont plus partagés maintenant sur les désavantages réels de cultiver le seigle & le froment confondus ; mais les vérités ont une peine infinie à surmonter les préjugés : il faut aux hommes une longue expérience pour être persuadés.

Une autre coutume non moins préjudiciable encore à l’économie, c’est de faire artificiellement du méteil, en mélangeant ensemble, dans des proportions différentes, du blé & du seigle, &, d’envoyer ces deux grains au moulin ; il faut au contraire les moudre séparément, employer constamment la farine du premier à la préparation du levain, & celle du second au pétrissage.

Il faut dans le travail de la pâte, & de la cuisson du pain de méteil, prendre le terme milieu des deux manipulations indiquées, & se rapprocher toujours de la méthode employée pour le seigle ; si c’est ce grain qui domine, agir différemment dans le cas contraire

Le pain de méteil est bon, savoureux & très-nourrissant, il participe des deux grains farineux les plus propres à nourrir sous, cette forme les Européens.


Article IV.

Du pain d’orge.

Pour tirer parti de l’orge au moulin, il faut éloigner la meule courante, afin de concasser seulement le grain, & séparer la première écorce ; on le convertit ensuite en farine comme les gruaux de froment.

La farine d’orge est presque toujours défectueuse à cause de la première enveloppe qui s’écrase un peu au moulin ; elle est sèche & rude au toucher, ayant un œil rougeâtre ; elle se durcit volontiers à l’air étant mise en boulette avec de l’eau, mais cette boulette se casse en s’allongeant, & est encore plus courte que celle du seigle.

On sait le levain très-ferme en y employant la moitié de la farine qu’on a dessein de transformer en pain : parvenue au pétrissage, la pâte doit être bien travaillée & bassinée, afin de lui donner autant de liant & d’égalité qu’elle est susceptible d’en prendre. Quant à la cuisson, il faut que le four soit moins chauffé, & que le pain y séjourne plus long-temps.

Le pain d’orge le mieux fabriqué est toujours rougeâtre, sec, dur & cassant ; la mie n’est ni flexible ni spongieuse ; à peine conserve-t-il, peu de temps après la cuisson, cette qualité qui appartient à toute espèce de pain frais, celle d’être tendre & humide au sortir du four.

Quand on le peut, il est infiniment plus avantageux d’associer l’orge avec le froment ou le seigle, mélangés ou séparément, mais sur-tout, d’employer la farine de l’un ou l’autre de ces deux grains dans l’état de levain,