Ces vastes fosses ne sont pas aussi nécessaires pour les mûriers nains & pour ceux qu’on destine aux taillis. Cependant, plus il y aura de terre travaillée, & mieux l’arbre réussira & prospérera. C’est une première dépense une fois faite pour toujours, dont on sera ensuite amplement dédommagé par le succès. On ne met point assez d’importance dans la plantation d’un arbre, & on ne voit pas que les replantation en regarnissemens des arbres qui meurent, sont plus coûteuses que ne le sera jamais une plantation bien faite, sans parler en outre du temps perdu qui ne se répare jamais. Quoi de plus ridicule que de voir ouvrir des creux de deux à trois pieds de largeur, & y planter un arbre à racines écourtées, comme s’il s’agissoit d’un chou ! La fosse doit-elle être faite pour l’arbre ? ou les racines de l’arbre doivent-elles être écourtées pour la fosse ? Le bon cultivateur trouve facilement la solution de ce problème. On a de beaux arbres, dira-t-on, sans cet excédent de dépense, sans de si grands trous : je conviens de cette assertion ; mais ceux qui seront plantés avec le plus grand nombre de racines possible, ne seront-ils pas dix fois plus beaux ? Dans un espace de temps donné, ne seront-ils pas plus forts, plus vigoureux, & sur-tout en mourra-t-il un si grand nombre que dans les plantations faites à la hâte & guidées par la parcimonie ? Que le plus incrédule des hommes sur ce fait fasse une ou deux expériences, & il se convaincra de la vérité de mes principes.
La distance d’un trou à un autre ne sauroit être fixée : elle dépend de la qualité du sol, du climat & de la destination de l’arbre.
Le mûrier est destiné à border les champs & les grands chemins, ou à couvrir un champ ; je parle du mûrier à plein vent. Le sol est bon, médiocre ou mauvais, sec ou humide. Six toises sont à peine suffisantes dans un bon fond, où les arbres sont placés en lisière ; quatre dans le médiocre, & trois dans le mauvais.
Il faut que la nature du sol soit bien chétive, si on sacrifie un champ entier à la culture du mûrier. Il vaut mieux alors le planter en mûriers nains ou en taillis, les pieds à la distance d’une toise en tout sens pour les taillis, d’une toise & demie pour les nains, & à trois toises, si les arbres sont à plein vent.
Section II.
Du temps & de la manière de transplanter cet arbre.
On gagne beaucoup à transplanter de bonne heure, & on risque beaucoup à replanter tard, sur-tout dans les provinces du midi ; j’en ai déjà dit les raisons. Lorsque les feuilles sont tombées, la sève ne se porte plus aux branches ; cependant on voit encore sous l’écorce un suc épais, couleur de lait, qui suinte à la première incision, & l’intérieur du tronc offre une eau limpide & rousse. Il faut attendre que la première soit rendue plus épaisse par quelque froid ou par le temps, & que la seconde ne soit plus sensible. Le mûrier, dit-on, est le plus prudent de tous les arbres, parce qu’il pousse fort tard ; c’est que sa végétation ne peut avoir lieu que lorsque la chaleur de l’atmosphère est à un certain point. Il est près d’un