Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/31

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cette même cheville il serre la terre contre, c’est-à-dire que les racines restent en paquets. On dira que tous les pépiniéristes ne travaillent pas ainsi : je répondrai que sur cent il y en a plus de quatre-vingts qui opèrent à la hâte, & comme il a été dit. Mais, ajoutera-t-on, ils ont de beaux arbres. Cette vigueur de végétation tient à la qualité & à la quantité d’engrais, & ces engrais sont déjà un grand vice de l’éducation de l’arbre ; ce qui sera bientôt prouvé.

Toute pourrette qui n’aura pas bien végété dans la première année du semis, soit par l’inconstance de la saison, soit par la négligence du cultivateur, doit être rejetée. Les pépiniéristes, pour ne rien perdre, la recèpent à fleur de terre, & laissent ce semis jusqu’à l’année d’après. On auroit tort de suivre cet exemple : toute pourrette qui n’a pas au collet de la racine la grosseur d’une plume à écrire, est trop foible pour être replantée. C’est la raison pour laquelle on ne doit négliger aucun soin dans le semis, & exciter la végétation par les engrais, les arrosemens, l’extirpation des mauvaises herbes, & les petits labours multipliés.

Section II.

Du sol de la pépinière.

Les pépiniéristes qui demeurent près des grandes villes, ont de grandes ressources dans les engrais de toute espèce ; elles sont très-utiles pour eux, & très-préjudiciables aux acheteurs. Ils préfèrent les excrémens humains à tous les autres ; ensuite la colombine, les fumiers des voiries, des tueries, des boucheries, &c. Il est certain que ces engrais occasionnent une végétation prodigieuse, surtout lorsqu’il est facile de largement arroser les arbres. Comme le mûrier ne doit pas être par la suite dans un terrain aussi engraissé, aussi substantiel, il a la plus grande peine à s’accoutumer à un sol, ou pauvre, ou médiocre, ou d’assez bonne qualité ; c’est tout au plus à la longue que cet arbre reprend le dessus. Le bon cultivateur qui travaille pour lui-même, & qui ne veut pas vendre ses arbres, n’imitera sûrement pas le pépiniériste. Il choisira un bon sol, le défoncera profondément, retravaillera souvent, & bannira toute espèce de fumier de sa pépinière. Si la couche inférieure de cette première superficie est argileuse, crayeuse, tuffacée, &c., les arbres réussiront mal, sur-tout si l’hiver y est pluvieux. Les racines ne pourront pas s’enfoncer, pivoter, & elles chanciront par l’humidité surabondante que retiennent ces couches imperméables à l’eau. Si, au contraire, la couche inférieure est graveleuse & sablonneuse, & ces substances mêlées en proportions nécessaires avec la terre végétale ou humus, il est démontré que les pourrettes réussiront à souhait, & encore mieux si la couche supérieure & l’inférieure sont formées par une terre bonne, légère & douce.

Section III.

De la conduite de la pourrette dans la pépinière.

On a déjà vu de quelle manière on devoit planter la pourrette ; elle ne doit pas l’être à la cheville, comme les choux, la vigne, &c.,