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CHAPITRE IV.

De la manière de multiplier les oliviers, & de leurs pépinières.


Section Première

Du sol de la pépinière.

Peu de positions réunissent toutes les circonstances qu’exige une bonne pépinière. Si de la disposition des abris dépend la prospérité de l’olivier dans les champs, à plus forte raison pour la pépinière, il faut garantir, autant qu’il est possible, les jeunes pousses des impressions rigoureuses du froid. La pépinière demande encore de ne pas être exposée aux raffales de vent, ni à un courant d’air trop rapide. Outre que les vents augmentent la froidure, qu’ils excitent une plus forte évaporation, & que souvent ils interrompent la transpiration insensible de l’arbre, d’où naît un reflux dangereux dans la circulation de la sève, il arrive que les rameaux battus des vents communiquent leur agitation à la tige, & de la tige aux racines qu’elles ébranlent & qu’elles déchaussent.

En admettant qu’on ait un abri par excellence, que la pépinière ne soit pas sujette à la dent meurtrière des lapins, des moutons, des bœufs, des mules, &c., il faut supposer que l’on a encore dans le voisinage assez d’eau & la facilité d’arroser au besoin. Pour peu qu’on ait de peine, pour peu que l’eau soit éloignée, le paysan différera d’arroser d’un jour à l’autre, & n’arrosera pas au besoin, à moins que le maître ne soit présent.

À la bonté de l’abri, à la facilité de l’irrigation, il faut encore réunir la qualité du sol. Si la terre est forte, compacte, tenace, argileuse, crayeuse, &c., les jeunes plants réussiront très-mal. Une bonne pépinière exige une couche au moins de trois à quatre pieds de profondeur d’une terre douce, légère, substantielle & un peu sablonneuse ; cette terre exigera, il est vrai, plus d’irrigations que les premières, mais les racines s’étendront sans peine, elles s’enfonceront plus avant, & les pousses seront en raison de celles des racines. D’ailleurs un semblable sol reçoit beaucoup plus d’impression de la chaleur que tous les autres ; la fraîcheur causée par les pluies se dissipe plus aisément, & l’eau y séjourne moins.

Il résultera de ce que l’on vient de dire, que la pépinière doit 1°. être placée contre un excellent abri ; 2°. Qu’elle doit être éloignée ou défendue contre la dent des animaux ; 3°. qu’il faut avoir de l’eau dans la proximité, & en quantité suffisante ; 4°. enfin, qu’il faut une couche épaisse d’une terre légère, douce & substantielle.

On objectera sans doute que l’olivier de pépinière doit un jour être replanté dans toute espèce de terrain, & qu’ainsi il ne doit pas être élevé délicatement : cela est vrai jusqu’à un certain point. Mais il faut observer que l’on met en terre un morceau de branche, de tronc, de racine, que ces individus ne peuvent végéter, croître & former des arbres qu’autant qu’ils formeront des racines ; qu’il ne s’agit pas ici d’élever l’olivier de sujets déjà enracinés, provenus de semis, & qui en naissant ont reçu de la nature des moyens d’accroissement.