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essentiel de conclure & de remarquer que la fleur n’épanouit jamais sur le rameau de la même année, mais sur celui de l’année précédente. Cette loi de végétation si constante dans nos provinces, est-elle la même, par exemple, à Lima ? Je n’ose l’affirmer. Ne tiendroit-elle pas, relativement à l’olivier, au peu de chaleur qu’il éprouve dans nos cantons. Je crois avoir observé que si deux années froides, toujours relativement à cet arbre, se succèdent, la frondescence est bien moindre, & le développement des germes plus imparfait. Au surplus je ne donne ceci que comme un simple apperçu, & ce que je dis sur l’effet de la plus grande intensité de chaleur du Pérou, que comme un doute qui mérite cependant d’être vérifié.

La prompte apparition des fleurs non encore développées, mais renfermées dans leurs calices, confirmeroit ce que je viens d’indiquer, puisqu’il n’est aucun arbre en France dont la fleur reste si long-temps à s’épanouir. Dans le courant d’avril les grappes de fleurs commencent à paroître, & l’arbre n’est en pleine fleur que dans le mois de juin. Un petit nombre d’espèces plus hâtives fait une légère exception à cette règle & le climat peut encore y contribuer.

Il est rare que l’olivier ne soit pas chargé de fleurs, mais le moment de leur épanouissement & le temps de leur durée, sont des époques rigoureuses qui tiennent dans la plus grande inquiétude le cultivateur, puisque c’est du bon aoûtement de la fleur que dépend la récolte. S’il survient une pluie, un vent froid, la fleur périt sans nouer ; si jusqu’à la fin de juin, il s’élève des brouillards, tout ou presque tout est perdu ; la fleur, le fruit tombent, & il ne reste plus sur l’arbre que les fruits des boutons tardifs qui n’étoient pas encore développés. Ces brouillards sont malheureusement très-communs dans les vallons, près des rivières & dans les endroits marécageux. Ils paroissent toujours quand il y a deux vents opposés dans l’atmosphère, & sur-tout lorsque les vents du sud veulent régner ; alors les rosées sont très-abondantes & l’humidité forte ; le soleil survient avec force, convertit le tout en brouillards, & les dissipe à la fin. Le seul moyen de prévenir ces désastreux effets, c’est de placer de la paille un peu mouillée du côté d’où le vent souffle, d’y mettre le feu, d’entretenir une fumée épaisse qui se répande sur tout le champ, enlève l’humidité surabondante des fleurs, & les préserve de la trop forte action du soleil. En été c’est un brouillard ; en automne ou au printemps, ç’auroit été une gelée blanche.

Pendant l’été la sécheresse & les grands coups de vent font tomber beaucoup de fruits quoique verts ; mais si la fleuraison a été bonne, on s’appercevra peu de cette perte, parce que les arbres resteront chargés de fruits. Aucune récolte n’est plus casuelle que celle de l’olive. L’arbre redoute les rigueurs de l’hiver, & il s’en ressent souvent jusqu’à la troisième année ; la bonne fleuraison est très-incertaine, & la conservation du fruit aoûté n’est pas toujours décidée. Je ne parle pas encore du tort que lui font les insectes.