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heureux pour avoir l’eau & la pente nécessaires, on plantera les oignons après que le sol aura été bien défoncé à la charrue, & disposé en ados & en sillons, comme dans les jardins. Les oignons y seront moins beaux à la vérité, mais la récolte en sera immense. On peut sur-tout employer à cette culture l’année de repos des terres ; celle en blé qui suivra, sera magnifique, si la saison n’y apporte aucun obstacle.

Plusieurs jardiniers, soit par défaut d’espace, soit parce qu’ils y trouvent mieux leur compte, ne cultivent pas, ou cultivent peu d’oignons comme récolte. Ils se contentent de faire de nombreux semis, & de vendre les oignons en pourrette, c’est-à-dire, prêts à être replantés. C’est une branche de commerce assez importante, parce que les semis ne réussissent pas par-tout, soit à raison du froid, soit par rapport au terrain trop compact, trop humide. Le sable mêlé convenablement à la terre, remédieroit à ce dernier défaut.

De la culture des oignons dans les provinces du nord.

Elle y est moins recherchée que dans celles du midi ; aussi les bulbes sont-elles moins belles, moins grosses & d’une saveur beaucoup plus âcre. Le climat, sans doute, influe sur l’oignon comme sur le céleri dont l’odeur est plus forte au midi, & la saveur plus douce. On ne sème point en pépinières proprement dites, mais par grandes planches, & la transplantation devient inutile.

Les auteurs s’accordent à dire que le sol ne doit pas avoir été fumé, & que les engrais de l’année précédente suffisent pour les oignons que l’on doit semer. Leur assertion est sans doute établie sur l’expérience ; mais pourquoi cette pratique est-elle diamétralement opposée à celle du midi ? Ce qu’il y a de certain, c’est que j’ai vu dans le centre du royaume, des oignons dont j’ai fait largement fumer les planches, & qui ont réussi à merveille ; il est vrai que c’étoit avec du fumier bien pourri. Les engrais disent-ils, augmentent l’acrimonie des oignons ; c’est parce qu’on se sert sans doute d’engrais trop nouveaux, d’où l’on a conclu qu’il suffisoit que le sol eût été fumé une année à l’avance. Cet objet est assez important pour qu’une personne instruite & sans prévention, s’occupe à comparer ces méthodes.

La manière de semer la graine, ne tient-elle pas encore à l’habitude ? On sème en février & en mars sur un sol labouré ; à la Toussaint & en janvier ; si la terre est forte, le labour doit être grossièrement fait, parce que, dit-on, la graine ne demande pas une terre fraîchement ameublie ; on régale ensuite le sol divisé en planches, & on marche par dessus les deux pieds joints.

C’est sur de telles planches, qu’on sème la graine à la volée, on en emploie deux onces environ sur quinze toises de longueur & six de largeur.

Si on a de la terre douce ou du terreau, on en recouvre le semis sur une épaisseur de deux à trois lignes. Si on n’en a point, on se contente de herser avec la fourche, afin de recouvrir légèrement la graine.

Cette méthode de semer l’oignon rouge, supposeroit que c’est une plante singulière dont la végétation est tout l’opposé de celle des autres plantes ; ce qui ne paroît guères