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On donne à ces animaux de la nourriture fraîche au moins une fois chaque jour, parce que cette espèce de nourriture est leur aliment naturel ; ils s’y sont accoutumés pendant toute la bonne saison. Lorsqu’on change entièrement cette nourriture en ne leur donnant que de la paille, ils ne sont plus allez nourris ; ils maigrissent peu à peu. Les bergers disent alors qu’ils perdent leur graisse, leur suif, c’est-à-dire, qu’ils dépérissent. La nourriture sèche les altère, ils boivent beaucoup d’eau qui peut leur donner plusieurs maladies, surtout celle de la pourriture. (Voyez ce mot) Un repas chaque jour de nourriture fraîche, les empêche de dépérir & d’être trop altérés. Lorsqu’on n’a point de nourriture fraîche à donner aux moutons dans la mauvaise saison, on y supplée par l’usage des grains, des légumes, des gerbées, &c. (Voyez le chap. VI, §. III, IV.) Une poignée d’avoine ou d’autre grain, suffit pour empêcher les moutons de dépérir.

§. III. De la quantité de paille & de foin à donner aux moutons.

Au mois d’Octobre & de Novembre, lorsque les moutons commencent à avoir besoin de manger au râtelier, il faut leur donner les choses qui ne se gardent pas long-temps, ou qui se gâteroient, parce qu’elles ne sont pas bien conditionnées. On commence par celles qui leur sont les moins agréables, comme la paille de froment, de seigle, & de conseigle, parce que si l’on commençoit par leur donner de la paille d’avoine qu’ils aiment le mieux, ils répugneroient dans la suite à manger les autres.

La quantité de paille nécessaire à un mouton, dépend de la hauteur de la taille de l’animal & de la qualité de la paille. Il faut donner chaque jour à un mouton de taille médiocre, deux livres & demie de paille d’avoine, si l’on a soin de remettre au râtelier celle qui en est tombée. Le mouton mange chaque jour, suivant les épreuves qui en ont été faites, un peu plus de deux livres de cette paille, & il en reste près d’une demie livre qu’il ne trouve pas bonne à manger, & qui se mêle avec la litière. On peut compter qu’il ne faut par jour qu’un fagot de paille d’avoine, pesant cinquante livres, pour vingt moutons de taille médiocre, si l’on relève après chaque repas, celle qui est tombée du râtelier.

La quantité de foin nécessaire à un mouton, dépend, comme la quantité de la paille, de la hauteur de l’animal & de la qualité du foin. Il faut donner chaque jour à un mouton de taille médiocre deux livres de foin commun, tiré d’une bonne prairie ; ces deux livres suffisent, si l’on a soin de remettre au râtelier le foin qui en est tombé. Ainsi on peut compter qu’il faut une botte de foin du, poids de dix livres, tirée d’une bonne prairie, pour cinq moutons, en supposant toujours qu’on relève, après chaque repas, ce qui est tombé du râtelier.

La paille ne suffiroit aux moutons que jusqu’au mois de Janvier, dans les pays où l’hiver est rude, parce qu’alors il n’y a plus guères de bonnes herbes. On y supplée en mêlant avec la paille un peu de foin ou d’autres bonnes nourritures, telles que les chaillats de pois, de haricot, de vesce, ou de lentille. (Voyez le chap.