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doivent être réservés en entier pour la nourriture des hommes.

On peut faire encore des gerbées avec des légumes, tels que les vesces, les lentilles, les pois & les haricots ; on recueille ces plantes avant que le fruit soit mûr, ou après sa maturité ; mais ces fourrages sont plus tendres & plus nourrissans, lorsqu’ils ont été recueillis avant leur maturité.

On fait aussi des gerbées du maucorne & de la dragée. On appelle maucorne un mélange de pois & de vesces semés ensemble, tandis que la dragée est un mélange d’avoine & de vesce d’été, ou de pois. On donne aussi le nom de dragée à un mélange d’avoine avec des pois, de la vesce, des lentilles, des lupins ou de fenûgrec. (Voyez tous ces mots)

Les feuillées sont des branches d’arbres garnies de leurs feuilles, que l’on donne aux moutons. On coupe ces branches après la sève d’août, avant que les feuilles se dessèchent ; on les laisse un peu faner, & ensuite on en fait des fagots.

Les meilleures feuillées sont celles d’aunes, de bouleaux, de charmes, de frênes, de peupliers, des saules, &c. ; on en peut faire de presque toutes les sortes d’arbres & des arbrisseaux.

§. V. Des meilleurs foins & de la meilleure paille. Des herbes dont on fait des prairies artificielles pour les moutons. De leurs effets. De leurs qualités. Des autres espèces de nourriture.

Les foins des prés, où l’eau de la mer monte, & que l’on appelle prés salés, sont les meilleurs pour les moutons, parce que l’eau de la mer y laisse du sel. Les foins des prés secs, où l’eau ne croupit jamais, sont aussi très-bons, parce qu’ils sont fins, délicats & agréables au bétail ; les foins qui ont été fauchés avant d’être trop mûrs, & qui ont été peu fanés, sont ceux dont ces animaux sont les plus friands.

Les prés bas & marécageux donnent des foins grossiers : leurs herbes sont rudes & désagréables au bétail. Les herbes qui croissent au bord des étangs & des rivières, les joncs des marais, les roseaux, sont encore plus mauvais pour faire du foin celui qui a été fauché, lorsqu’il étoit trop mûr, ou qui a été trop fané, a perdu son suc ; il est peu nourrissant. Le foin qui a été mouillé pendant la fenaison perd sa couleur & ses bonnes qualités ; il ne se garde pas ; il est sujet à s’échauffer & à se pourrir dans le fenil. Le foin qui a reçu quelque mauvaise odeur des étables, ou qui a été mouillé & moisi, dégoûte les bêtes à laine ; celui qui a été rouillé est très-mauvais, parce qu’il donne à ces animaux des maladies de poitrine ; ils ne le mangent que lorsqu’ils y sont forcés par la faim.

Pour avoir des prairies qui ne portent que des herbes de bonne qualité & d’un bon rapport, il faut nécessairement commencer par détruire, par la culture, toutes les herbes qui y sont, & ensuite en semer d’autres, bien choisies pour le terrein où on les met, & pour l’emploi que l’on en veut faire : c’est par ce moyen que l’on obtient des prairies artificielles pour les moutons.

Les herbes dont on fait des prairies artificielles sont le fromental, la coquiole, le raygrass, la luzerne, le trèfle, le sain-foin, la pimpre-