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On ne risque rien de traire les brebis dont la laine est de mauvaise qualité & de peu de produit, mais il ne faut pas traire celles qui ont de bonne laine, & principalement celles dont on veut relever ou maintenir la race ; cependant, si elles étoient soupçonnées de maladies produites par des humeurs trop abondantes, on pourroit les traire une ou deux fois par semaine, pour donner issue à ces humeurs. On croit que cette précaution les préserve de la pulmonie, de la pourriture, &c ; (Voyez ces mots) mais il faudroit jeter ce lait comme mal sain.

Quant à l’usage du lait de la brebis, il est le même que celui de la vache ; (Voyez Bœuf) il rend moins de petit lait, mais il est plus gras & plus agréable au goût, il a plus de parties propres à faire du fromage ; on en fait de très-bons & de très-recherchés, principalement ceux de Roquefort en Rouergue.

VII. Des soins qu’il faut avoir lorsqu’un agneau vient de naître. Manière de reconnaître la bonne qualité de lait. Ce qu’il y a à faire lorsque la mère n’a point de lait, ou n’en a pas assez, lorsqu’il est mauvais, qu’elle est malade, ou qu’elle est morte en agnelant.

Lorsqu’un agneau vient de naître, il faut visiter le pis de la mère, pour couper la laine, s’il y en a dessus, pour savoir s’il est assez plein de lait, & pour en faire sortir des mammelons, afin de voir s’il est bon ; ensuite il faut prendre garde si la mère lèche son agneau, & si l’agneau la tette.

On peut croire que le lait est bon, lorsque la mère est en bonne santé, & lorsqu’il est blanc & de bonne consistance, c’est-à-dire, assez épais ; mais lorsqu’il est gluant, bleuâtre, jaunâtre ou clair, il est mauvais.

Si une brebis mère est malade, ou si elle est morte en agnelant, il faut donner à l’agneau, pour l’allaiter, une autre mère qui aura perdu le sien, ou une chèvre qui aura du lait.

Il arrive souvent qu’une brebis ne veut pas allaiter un agneau qui ne vient pas d’elle ; mais on dit que l’on peut la tromper en couvrant cet agneau pendant une nuit avec la peau de celui qui est mort, si cette peau est encore fraîche ; quoiqu’on l’ôte le matin, la brebis croit déjà avoir retrouvé son propre agneau : mais on a éprouvé un moyen plus facile que celui-là, c’est de frotter seulement l’agneau mort contre celui que l’on veut faire tetter à sa place.

Si l’on n’a ni brebis, ni chèvre pour allaiter un agneau privé de sa mère ; on fait boire à cet agneau du lait tiède de brebis, de chèvre ou de vache, d’abord par cuillerées, ensuite au moyen d’un biberon dont le bec est garni d’un linge, afin que l’agneau puisse sucer ce linge à-peu-près comme le mammelon d’une brebis : on lui présente le biberon aussi souvent qu’il auroit tetté la mère. Il faut faire ensorte que le museau ne soit pas trop élevé, parce que dans cette posture le lait pourroit suffoquer l’agneau en entrant dans le cornet ; on tient l’agneau dans un lieu un peu chaud, pour suppléer à la chaleur qu’il auroit reçue de sa mère, s’il avoit été couché contr’elle. Il y a des agneaux qui, au bout de trois jours, peuvent se passer de bi-