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enfin, le véritable humus. (Voyez le dernier chapitre du mot Culture, & le mot Amendement.) Cette couche, après un certain nombre d’années, a quelquefois de quatre à six pouces d’épaisseur. Voilà une ressource bien précieuse pour les fleuristes & pour les amateurs, la nature en fait tous les frais, & l’amateur n’a d’autre dépense à faire que de l’enlever. Si l’éloignement, les frais ou d’autres circonstances, ne permettent pas de voiturer la terre, on peut faire de très-gros paquets ou ballots de mousse, & les charger sur un animal ou sur une charrette. Le sol des forêts, les grottes un peu humides, sont couverts par cette plante. Une fois arrivée au dépôt de l’amateur, il fait un lit de terre, un lit de mousse de la même épaisseur, & ainsi de suite ; le dernier est en terre ; & la mousse de chaque lit doit être recouverte avec la terre, afin qu’il n’en paroisse point sur les bords que l’on tasse fortement afin de retenir la terre. Si ce mélange a lieu au printemps, ou au commencement de l’été, il est prudent d’arroser largement chaque lit de mousse, afin que la chaleur, faisant travailler l’humidité intérieure du monceau, y excite une prompte fermentation, & par conséquent une plus prompte décomposition des principes des plantes. Lorsqu’on s’aperçoit que les mousses sont pourries, on passe la terre à la grille, & on met de côté la mousse qui est restée entière, afin qu’elle serve dans un nouveau monceau. Si aux lits des plantes on ajoute la terre du sol qui les nourrissoit, il convient de proportionner la masse de terre vierge… La mousse sert encore à couvrir les semis des plantes délicates, qui exigent que le terrein reste meuble, & ne soit pas serré par les arrosemens.

Il faut observer qu’une plante de mousse, qui reste exposée à l’air, au soleil, par exemple, pendant plusieurs mois, ou même pendant une année, se flétrit, & se desséche, & ressemble à une plante parfaitement morte ; mais si on la remet en terre & qu’on l’arrose, elle reprend sa première végétation qui n’avoit été que suspendue. Ce qui prouve combien il est important que tous les lits de mousse du monceau soient cachés par la terre.

Les mousses, employées comme litière, sont excellentes, parce qu’elles se pénètrent bien des urines & des excrémens ; mais on ne doit employer le fumier qui en résulte, que lorsqu’il est bien consommé.

Tout est habitude ; les gens de la campagne dorment sur un peu de paille, sur des feuilles de noyer, de châtaignier, &c. ; cependant on peut ajouter facilement à leur bien-être en se servant de la mousse, parce qu’il est aisé d’en faire de très-bons matelats.

On choisit & on ramasse la mousse lorsqu’elle est dans sa plus forte végétation, c’est-à-dire, au mois d’août, & on la débarrasse, autant que l’on peut, de la terre qui est restée attachée aux racines. Il faut choisir la mousse la plus longue, la plus douce, & en séparer tout corps étranger. On porte cette mousse sous des hangards, & on l’y étend afin de la faire sécher. Lorsqu’elle est assez sèche, mais non pas cassante, on la place sur des claies, & on la bat légèrement avec des baguettes, ce qui finit de la