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demi de hauteur sur quatorze pouces d’épaisseur, ne coûtent, transportées jusqu’à Saint-Nazaire, que de cent cinquante à deux cent livres, & en leur donnant la proportion que je demande, elles seroient excellentes pour le nouveau moulin. J’ai vu de semblables laves dans les montagnes de l’Esterelle, que l’on traverse pour aller de Toulon à Antibes ; mais la difficulté du transport en rendroit le prix trop excessif… La chaîne de montagnes contre laquelle la ville de Grasse est adossée, fournit des marbres à grains durs & excellens, dont on tireroit de bonnes meules, & même dans des grandeurs plus considérables que celle de dix pieds.

Plus la pierre sera dure, plus son grain sera serré, & mieux elle vaudra pour ettriter l’olive. Celle que l’on nomme ordinairement pierre meulière, (lapis molitoris) quoique excellente pour moudre le blé, n’a pas le même avantage pour l’olive ; elle s’use trop facilement, & elle est trop persillée. La pâte de l’olive se niche dans cette espèce de carie ; ces petites cavités correspondent presque toutes les unes avec les autres ; elles font, pour ainsi dire, l’office de siphon, & une quantité d’huile est absorbée par cette pierre. Ce n’est encore qu’un demi mal, puisqu’une fois farcie de pâte & d’huile, elle ne sauroit en recevoir davantage ; mais cette pâte & cette huile moisissent, fermentent, se rancissent, & acquièrent enfin la causticité des huiles essentielles. On sent combien, dans cet état, elles communiquent facilement leur mauvais goût & leur mauvaise odeur à la pâte fraîche qu’elles broyent. Le besoin exigeroit donc de démonter tous les mois ces meules pour les laver & les nettoyer à fond ; ce qui seroit encore presque impossible.

J’avois publié ce mémoire en 1777, & tout ce que j’ai vu en fait de moulins à graines & à fruit, depuis cette époque, ne sert qu’à confirmer mon opinion sur l’excellence du moulin Hollandois ; j’en avois fait faire un modèle en Hollande, je l’ai envoyé à M. de Marange, à Cadillac sur Garonne, près de Bordeaux, où il va le faire exécuter, & je ne doute pas que son exemple ne soit bientôt suivi dans les provinces voisines où l’on fait calculer. Si j’avois eu de l’eau à ma disposition, il y a long-temps qu’il seroit sur pied dans l’endroit que j’habite.

Section III.

Des moulins à fruit.

Ils servent communément aux noix, noisettes, faînes, pommes, poires, olives, &c.

L’emplacement d’un moulin à graines huileuses n’est pas indifférent ; car l’on sait que lorsque le froid s’y fait sentir, ces graines lâchent plus difficilement l’huile qu’elles contiennent ; par conséquent il y a une perte réelle pour le propriétaire ; & cette perte augmente en raison de l’intensité du froid. Malgré cette observation, connue dans tous les pays, on voit cependant presque par-tout ces moulins mal recouverts, les fenêtres n’en sont pas fermées par des châssis, & souvent leur toîture est percée par de grandes lucarnes destinées à l’issue de la fumée des fourneaux. Les propriétaires de pareils moulins, & sur-tout ceux qui retiennent comme salaire, une partie des marcs de ces graines,