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, dont la poussière fétide nuiroit à la qualité des farines & à la salubrité du pain. L’homme se plaint souvent d’un grand nombre de maladies dont il ignore la source ; il la trouveroit dans son indolence à nettoyer les grains dont il se nourrit. Lorsque le coup de poignet a fait monter toutes ces saletés, qui se rassemblent au-dessus du bon grain parce qu’elles sont plus légères que lui, on les enlève soigneusement à la main, ce qui ne peut s’opérer aussi parfaitement dans les autres cribles que dans le crible normand qui mérite, à cet égard, la préférence, ou du moins qui est plus à la portée de tout le monde.

Après cette opération, on verse le bon grain qui n’a pu passer par le crible normand, dans un grand crible cylindrique à fil de fer, dont la tête étant plus serrée, laisse passer le grain moyen, & forme le bled du milieu : la partie inférieure de ce cylindre étant un peu plus ouverte, livre passage aux grains les plus gros, les plus ronds & les mieux nourris, qui forment le bled de la tête.

Après la division faite de ces bleds en trois qualités, ils ne sont point encore nettoyés des poussières provenant du mélange des grains étrangers, de la nielle & de la poussière du charbon, dont la brosse du grain peut être garnie.

Mais on remplit ce dernier objet, en faisant passer chaque qualité de grain séparément par le ventilateur[1] ou crible à vent, que les meuniers nomment tarare, mot significatif, emprunté du bruit qu’il fait.

Du ventilateur, le bled tombe dans un grand cylindre de fer-blanc, appellé crible des Chartreux, dont les feuilles de fer-blanc sont piquées en-dedans en manière de rape pour nétoyer & comme raper les grains qui y sont ballotés, afin d’enlever la poussière de charbon dont ils pourroient être tachés. Au sortir du cylindre de fer blanc, les bleds coulent dans un second crible d’Allemagne, au bas duquel est un émotteux, pour arrêter les pierres & les petites mottes de terre qui auroient pu passer avec le bled par tous les cribles. Une petite poche de cuir qui est attachée sous ce dernier crible incliné, en reçoit les criblures & mauvaises graines. D’autres se servent d’un petit ventilateur qui est préférable au crible d’Allemagne, attendu que le cylindre en rape, ayant occasionné beaucoup de crasse & de poussière dans le bled par les tours qu’il a fait, le vent les jette hors ou dans une poche. Enfin, le bled bien nettoyé tombe dans la trémie, & delà entre les meules, où il est écrasé. Ce manœuvrage industrieux des bleds en augmenteroit beaucoup la valeur.

Il faut supposer un étage supérieur dans tous les moulins ordinaires, pour y placer les différens cribles dont j’ai parlé, & pour faire tourner par le même moteur un ventilateur ou tarare, fig. 8 & 9, Planche XVI, un crible des Chartreux, fig. 14, & une bluterie cylindrique, fig. 5, 6 & 7, destinée pour bluter à part les sons gras lorsqu’on les a un peu laissés sécher, afin d’en tirer encore mieux la farine qui pourroit y être restée adhérente : elle peut aussi faciliter le travail des moulins qui, tandis que la bluterie sépare les

  1. Voyez figure 2, 3, 4 de la même gravure que l’on vient de citer.