la chaux. Il en fit deux lots séparés, qu’il gâcha avec une égale attention. Le premier lot, sans aucun mélange, fut mis dans un vase de terre vernissé & exposé à l’ombre, à une dessication naturelle. À mesure que l’évaporation de l’humidité se fit, la matière se gersa en tout sens. Elle se détacha des parois du vase, & tomba, en mille morceaux, qui n’avoient pas plus de consistance que les morceaux de chaux nouvellement éteinte, qui se trouvent desséchés par le soleil sur les bords des fosses.
Quant à l’autre lot, M. Loriot ne fit qu’y ajouter un tiers de chaux vive mise en poudre, & amalgamer & gâcher le tout, pour opérer le plus exact : mélange qu’il plaça dans un pareil vaisseau vernissé. Il sentit peu-à-peu que la masse s’échauffoit, & dans l’espace de quelques minutes, il s’aperçut qu’elle avoit acquis une consistance pareille à celle du meilleur plâtre détrempé & employé à propos. C’est une sorte de lapidification consommée en un instant. La dessication absolue de ce mélange est achevée en peu de temps, & présente une masse compacte sans la moindre gerçure, & qui demeure tellement adhérente aux parois des vaisseaux, qu’on ne peut l’en tirer sans les briser. Si le mélange est fait dans une exacte proportion, il n’éprouve ni retrait ni extension, & reste perpétuellement dans le même état où il s’est trouvé au moment de sa fixité.
M. Loriot forma avec ce composé différens bassins, & vit qu’après les avoir laissé sécher, l’eau qu’on y avoit mise n’avoit éprouvé d’autre diminution que celle qui est une suite de l’évaporation ordinaire, & le poids du bassin exactement reconnu avant l’expérience, a été strictement le même après l’opération.
Ces expériences, suffisantes pour le moment, ne décidoient pas quels seroient sur ce mortier les effets de l’intempérie des saisons : de nouvelles épreuves ont démontré que ce mortier acquéroit progressivement plus de solidité.
Il est donc certain que l’intermède de la chaux-vive en poudre dans toutes sortes de mortiers & de cimens faits avec la chaux éteinte, est le plus puissant moyen pour obtenir un mortier inaltérable. Telle est la base de la découverte de M. Loriot. En voici quelques conséquences. Dès que par le résultat de l’expérience, il est prouvé que les deux chaux se saisissent & s’étreignent si fortement, l’on conçoit qu’elles peuvent également embrasser & contenir les autres substances que l’on y introduira, les serrer & faire corps avec elles selon la convenance plus ou moins grande de leur surface, & par-là augmenter le volume de la masse que l’on veut employer.
Les corps étrangers, reconnus jusqu’ici pour les plus convenables à introduire dans le mortier, sont le sable & la brique. Prenez donc, pour une partie de brique pilée très exactement & passée au sas, deux parties de sable fin de rivière passé à la claie, de la chaux vieille éteinte en quantité suffisante pour former dans l’auge, avec l’eau, un amalgame à l’ordinaire, & cependant assez humecté pour fournir à l’extinction de la chaux vive que vous y jetterez en poudre jusqu’à la concurrence du quart en sus de la quantité de sable & de brique pilée, pris ensemble. Les matières étant bien