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terdit pour l’intérieur, parce qu’il gêneroit l’ouvrier qui ouvre & ferme les rigoles lorsqu’il s’agit d’arroser.

Un point essentiel à observer dans la formation des jardins à irrigation, c’est qu’après en avoir tracé le plan sur le sol, on doit donner plus de profondeur aux tranchées destinées à recevoir les arbres, qu’à celles du reste du jardin. Fouiller & retourner la terre à la profondeur de deux pieds, est très-suffisant pour les légumes, mais ce n’est point assez pour des arbres à plein vent. Sans cette précaution leurs racines, au lieu de plonger dans la terre, s’étendront horizontalement dans le voisinage, & nuiront aux légumes.

CHAPITRE IV.

Du jardin destiné aux fleurs.

Je ne parlerai pas ici de ce qu’on appelle parterre, il est du ressort des jardins nommés de propreté, dont il sera question dans l’article suivant. Il s’agit uniquement du jardin des amateurs fleuristes.

Section Première.

De sa situation, de la préparation du sol, &c.

I. De sa situation. Il doit être placé dans un lieu un peu élevé, où passe un libre courant d’air, mais cependant abrité contre les vents du nord, & des côtés par lesquels soufflent communément les vents impétueux. Il est cependant à souhaiter qu’il ait, soit par art, soit naturellement, toutes les expositions, afin que l’amateur puisse y cultiver les plantes agréables qui naissent soit au midi, soit au nord ; elles ne réussissent jamais bien dans un petit jardin, environné de maisons trop élevées : la lumière du soleil y arrive trop tard, ou le quitte trop tôt ; la chaleur s’y concentre, & elle n’est pas tempérée par un courant d’air frais : l’humidité une fois introduite se dissipe difficilement ; les rosées & le serein y sont plus abondans, & les gelées fortes ou foibles y sont plus destructives.

La seconde condition est que l’eau y soit abondante, ou du moins proportionnée aux besoins ; si elle vient d’une source, qu’il y ait un réservoir susceptible d’en contenir une certaine quantité, afin que son degré de chaleur suive celui de l’atmosphère, (Voyez ce qui a été dit aux mots Arrosement, Fontaine, Irrigation.)

La troisième, que le jardin ait un niveau de pente, doux & proportionné à son étendue, afin que les eaux pluviales n’y séjournent pas. Si la pente est trop rapide, la terre végétale ou humus, naturellement & totalement soluble dans l’eau, sera entraînée, & il ne restera plus que la terre matrice.

II. De la qualité du sol. Je sais qu’entre les mains d’un fleuriste, le sol devient toujours ce qu’il veut qu’il soit, parce que s’il est argileux, il le fait enlever, & le supplée par un terrein préparé ; s’il est sablonneux, il donne le corps & l’agglutination nécessaires à ses molécules ; enfin, la terre d’un jardin destinée aux fleurs n’est point une terre naturelle, on n’en trouve aucune semblable, elle est créée par l’art. Il est cependant très-important, pour un jardin de ce genre, de trouver dans l’origine un