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preuve certaine que la terre n’est pas d’un grand rapport, &c. » À ces préceptes, il convient d’en ajouter quelques autres.

De l’achat d’une métairie, dépend la fortune d’un homme simplement aisé. Si l’acquisition est bonne, c’est un trésor dans ses mains, pour peu qu’il ait de l’intelligence & de la conduite ; si l’acquisition est médiocre, cette métairie ressemblera à un arbre planté dans un sol de peu de qualité, qui végète mal, à moins que l’œil du maître ne veille perpétuellement sur sa culture ; si elle est mauvaise, le propriétaire est ruiné. Par ces mots, bonne, médiocre & mauvaise, je n’entends pas parler de la masse d’argent à compter pour l’acquisition, mais des fonds de terre, & de l’état des bâtimens. En effet, une vaste métairie, dont la majeure partie des fonds est essentiellement mauvaise, est toujours ruineuse pour le cultivateur, soit à cause du peu de produit, soit à cause de l’éloignement. Cette nature de terre, dans l’espace de dix ans, coûte plus qu’elle ne produit. On perd donc, & l’intérêt du prix de l’acquisition, & celui de ses avances foncières, (Voyez ce mot), & ses déboursés pour la culture. Les prétendus bons marchés ruinent ; payez plus cher, mais achetez du bon…

Ces assertions demandent quelques modifications. J’appelle un bon fonds, celui que les belles récoltes prouvent être tel, & celui qui n’est pas productif dans le moment, soit par la négligence du propriétaire, ou soit parce que ses moyens ne lui permettent pas de le faire valoir, quoiqu’il soit de qualité. Ce n’est donc pas par une rapide inspection des terres, des champs, des vignes, &c. ni par une simple promenade qu’on peut s’assurer de la valeur d’une métairie, mais par un examen long & réfléchi, par de petites sondes faites de distance en distance, sur les lieux qui paroissent médiocres ou mauvais ; par la végétation plus ou moins active des arbres & des arbrisseaux, &c. Ne vous pressez donc jamais d’acquérir sans une connoissance complète de la masse ; pesez les avantages & les défauts de la totalité ; calculez les produits, les bonifications dont l’ensemble est susceptible ; les réparations, qui ne portent point d’intérêt, & les avances foncières qu’une métairie exige : (relisez le mot Avances foncières, il est essentiel à celui-ci.) Enfin, d’après un calcul fait sans prévention, voyez s’il est plus que probable, que le produit de cette métairie soit en proportion de l’intérêt de la somme que vous devez donner, soit pour l’acquisition, soit pour les avances foncières, soit pour les droits de lods & ventes, soit enfin pour les droits du roi ; si tous ces objets se trouvent réunis, ne laissez pas échapper l’occasion. Voilà, quant à la valeur intrinsèque de l’acquisition. Occupons-nous actuellement de l’examen des accessoires.

Les chemins, les routes qui conduisent aux différentes possessions, sont-ils bons & praticables pendant toute l’année ? Les champs situés sur le penchant des colines, sont-ils environnés de fossés, afin de prévenir la dégradation des terres, par les grands lavages des eaux pluviales ? Les champs de la plaine sont-ils submergés, inondés ; pendant combien de temps ? Peut-on facilement donner issue aux eaux surabondantes ? Le lit des rivières, des torrens qui