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de leurs citrouilles, de leurs potirons ? Ils n’en savent rien ; mais ils l’ont vu pratiquer à leurs pères, & ils n’examinent pas si la nature a jamais rien produit en vain. Ne séparez aucune fleur mâle, quand elle aura rempli l’objet pour lequel elle est destinée elle se flétrira & tombera d’elle-même ; mais auparavant il s’en trouvera dans le nombre qui auront servi à féconder les fleurs femelles, & dont le fruit nouera certainement & viendra à bien, tandis que plus des trois quarts des fleurs femelles, non fécondées, se fondent & avortent.

Aussitôt après la transplantation, ou peu de jours après ; enfin, lorsque le plant a quatre ou cinq feuilles, outre les deux cotylédons que les jardiniers appellent preilles, on rabat au-dessus des feuilles les plus près des oreilles. De l’aisselle de chaque feuille qu’on a laissée, part une nouvelle tige ou bras qu’on laisse s’étendre & se charger des fleurs dont on vient de parler, & de ces bras il en sort ensuite plusieurs autres connus sous le nom de coureurs. On leur laisse le temps d’acquérir de la force. Après cela, on supprime les plus foibles, pour ne conserver que deux ou trois des plus vigoureux. Ces nouveaux bras, lorsqu’ils ont cinq feuilles, sont encore arrêtés, & ainsi de suite mais s’il en survient du pied, on les supprime, parce qu’ils deviennent pour la plante ce que les gourmands sont aux arbres, c’est-à-dire que leur prospérité affame tous les bras supérieurs. Le nombre des melons à conserver sur un pied, est depuis deux jusqu’à cinq, suivant la force de végétation ; mais avant de détruire les fruits surnuméraires, il convient de choisir ceux qui promettent le plus, soit par leur grosseur, soit par leur belle forme. Il est rare, ainsi qu’on l’a déjà dit, qu’un melon mal conformé soit bon… Après le choix, si la tige est foible, on taille à un œil au dessus du fruit ; si elle est vigoureuse, à deux ou à trois. Il convient de ne supprimer les cloches que lorsque la saison est assurée, & après que le fruit a acquis la grosseur d’un œuf de pigeon. Si, après de beaux jours, l’air redevient froid, on remettra les cloches, & on les laissera autant de temps que le froid durera.

Les melons ainsi élevés craignent les pluies ou les arrosemens qui baignent les feuilles, les bras & les fruits. Afin de prévenir cet inconvénient, on couvre avec des cloches, & l’eau des pluies arrose la terre de la circonférence ; comme l’humidité gagne de proche en proche, elle pénétre jusqu’aux racines, & elle suffit à la plante. Les chassis ont l’avantage de garantir des pluies, & on les couvre facilement avec des paillassons, faits exprès, lorsque l’on veut garantir la plante de la grande ardeur du soleil. Les fréquens arrosemens sont les vrais destructeurs de la qualité du fruit, quoiqu’ils en augmentent le volume : il vaut mieux que le pied souffre un peu de sécheresse, que d’être trop arrosé.

Depuis l’époque de la fixation du nombre de fruit sur chaque pied jusqu’à sa maturité, il pousse une infinité de petits bras foibles, qui épuisent les deux à quatre principaux qu’on a conservés ; s’ils sont foibles, cette multiplicité de surnuméraires aura bientôt diminué leur subsistance : il est donc nécessaire de visiter tous les huit jours sa melonnière, & d’en