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l’air fixe quelle recèle, par la terre végétale ou humus qu’elle contient ; enfin, mécaniquement, par la division extrême de ses parties. On voit par ces détails que la marne est un excellent engrais qui réunit tous les matériaux de la sève, à l’exception de la partie huileuse, qui les rend savonneux, & susceptibles par conséquent d’une dissolution extrême dans l’eau qui leur sert de véhicule.

Que la marne ne soit, si l’on veut, qu’un amas des débris de coquilles, qu’une chaux naturelle, ou simplement une terre calcaire par excellence, abstraction faite des autres terres auxquelles elle est unie, sous quelque forme qu’on la considère, on ne peut nier qu’elle ne soit abondamment pourvue de sels, & que ces sels ne soient alkalis. Ils ont une tendance singulière à absorber l’air de l’atmosphère, à se naturaliser par leur combinaison avec le sel nommé aérien par le célèbre Bergman, enfin, à absorber l’humidité de l’air qui fait déliter la marne, & la réduit en poudre impalpable, de la même manière que la chaux ordinaire, après qu’on l’a retirée du four. Or tous les sels fécondent la terre toutes les fois qu’ils se trouvent proportionnés avec les matières graisseuses ou huileuses. (Voyez le mot Amendement, & le dernier Chapitre du mot Culture) Si les sels surabondent, il en résultera, pour un certain temps, le mauvais effet détaillé au mot Arrosement & au mot Engrais. Enfin, ces sels n’agiront efficacement que lorsque la combinaison savonneuse sera achevée.

La présence de l’air fixe est démontrée dans la marne par les bulles d’air qu’elle laisse échapper dans l’eau qui sert à la dissoudre, & par l’effervescence & par le bouillonnement qui sont excités, lorsqu’on verse un acide sur elle. J’ai fait voir cent & cent fois, dans le cours de cet Ouvrage, combien cet air influoit sur la végétation, comment il devenoit le lien de toutes les parties des plantes, & contribuoit à la solidité, de leur charpente ; que les arbres dont le bois est le plus dur, en contenoient davantage ; enfin qu’un vase, toutes circonstances étant égales, placé sur un champ aride, un second sur un champ fertile & labouré, & un troisième près d’une bergerie, offroient des différences sensibles dans les progrès de la végétation des plantes qu’ils contenoient, en raison de la quantité d’air fixe qu’elles absorboient de l’atmosphère. Or, si cette différence est si sensible, simplement en raison de l’air extérieur, combien donc doit-elle l’être lorsque cet air fixe est concentré dans la terre, & sur-tout lorsque le surplus de celui qui a servi à former la sève, s’échappe e la terre, & est absorbé par les feuilles des plantes. Pour bien saisir ce qu’on vient de dire en abrégé, consultez le mot Air, & particulièrement les chapitres qui traitent de l’air fixe.

Si, suivant quelques auteurs, la marne est le résultat de la décomposition des substances calcaires & des végétaux, elle doit nécessairement renfermer une grande quantité de terre végétale ou humus, la seule qui entre & qui constitue la charpente des plantes. Ainsi, dès que cette terre végétale & parfaitement soluble dans l’eau, sera dissoute par elle, & combinée avec les aunes matériaux de la sève, elle doit donc, de toute né-