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La cure. L’indication curative doit se borner, 1°. à diminuer l’abondance de la lymphe, & à la rendre plus fluide. Pour obtenir cet effet, on donnera peu à manger au cheval qui sera atteint du mal de taupe, & principalement le soir ; les fourrages provenans des prairies les plus lèches, l’avoine, les eaux les moins pesantes, l’écurie la plus sèche, & tenue proprement, le pansement de la main, & la continuité du travail auquel il est habitué, tous ces soins rempliront la première indication. 2°. On en aidera l’effet, en atténuant les humeurs, & en enlevant les obstructions, par l’usage des ptisanes faites avec la salsepareille, l’esquive, le sassafras & les baies de genièvre, & par celui des ptisanes faites avec les racines & les feuilles de chicorée sauvage, de pimprenelle, de cerfeuil, de laitue, &c. ; les eaux minérales, ferrugineuses, ou les eaux thermales, conviennent encore beaucoup en pareil cas ; on purgera ensuite (Voyez Méthode purgative) avec la confection hamech, le jalap, l’éthiops minéral & l’aloès succotrin : on ne doit point négliger ces précautions, parce qu’il survient très souvent, après la guérison, des métastases funestes, qui donnent la mort à l’animal lorsqu’on s’y attend le moins.

La cure particulière du mal de taupe s’exécute par la résolution, par la suppuration ou par l’extirpation ; si la tumeur est nouvelle & molle, elle peut se résoudre, en y appliquant, après avoir rasé le poil, l’emplâtre de vigo-cum-mercurio ; l’onguent de styrax, mêlé avec les fleurs de soufre, ou avec l’éthiops minéral, &c, peuvent en opérer la résolution.

Mais si la tumeur ne se résout point, & qu’au contraire elle soit disposée à suppurer, on peut en faciliter la suppuration par les cataplasmes émolliens, par l’onguent basilicum. La suppuration s’étant déclarée, il faut aussitôt ouvrir l’abcès ; quand le pus en est sorti, on détergera l’ulcère, & l’on consumera les chairs superflues & le kiste au moyen de l’onguent ægyptic, de l’alun brûlé, du précipité rouge, du beurre d’antimoine ou de la pierre infernale. Il faut détruire jusqu’au bouton rouge qui se trouve ordinairement dans le fond ; sans cette précaution la tumeur se renouvelleroit.

Enfin, si la tumeur ne prend pas la voie de la suppuration, ou qu’on ne juge pas à propos de l’attendre, on en viendra à l’extirpation ; la cure sera plus prompte, pourvu que le cheval soit bien préparé. Pour faire cette opération, il faut d’abord ouvrir la tumeur, ou par une incision cruciale avec le bistouri, ou par une traînée de pierres à cautère, qu’on applique à travers une emplâtre fenetré, & qu’on couvre d’une autre emplâtre. L’ouverture étant faite, on sépare par la dissection la tumeur d’avec les lèvres de la plaie & des parties voisines, & on l’emporte toute entière avec le kiste ; on la consume par le moyen des caustiques ci-dessus rapportés, ce qui prolonge la guérison. Il faut avoir l’attention, de consumer aussi le bouton ou la racine de la tumeur ; la pierre infernale ou le cautère actuel y réussiront promptement ; ensuite on incarnera & on cicatrisera la plaie à l’ordinaire, réprimant les chairs superflues avec l’alun brûlé, ou quel qu’autre caustique. M. B. R. A.