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qu’une pièce de plusieurs arpens en produit à peine un épi. Le maïs jaune & le maïs blanc sont donc les variétés principales que l’on cultive.

Maïs blanc. Il passe en Béarn pour être le plus productif, l’épi en est aussi plus gros, & la tige plus haute ; mais cette différence ne dépendroit-elle pas de ce qu’on le sème sur les meilleurs terreins, bien fumés, tandis que dans cette province on sème le maïs jaune dans les terres marécageuses, qui n’ont pas besoin d’engrais ; cependant on préfère assez constamment l’un à l’autre ; & lorsque les Américains de la nouvelle Angleterre ne récoltent que du maïs jaune, ils le vendent pour en acheter du blanc, dont la galette, selon eux, a une meilleure qualité.

Maïs jaune. La couleur primitive de ce grain paroît être jaune ; elle est du moins la variété la plus universellement répandue. On prétend que les terres sablonneuses lui conviennent mieux qu’au maïs blanc, & qu’elle est même un peu plus précoce : aussi est-elle choisie de préférence, lorsqu’on a dessein d’en couvrir des terres qui ont déjà rapporté. Il seroit à souhaiter que dans tous les cantons à maïs on fût attentif à ces considérations ; elles n’échappent point aux Béarnois, ni aux Américains particulièrement, qui, dans les terres sablonneuses, ne cultivent que du maïs jaune, malgré leur prédilection pour le maïs blanc.


Section IV.

Des accident qu’éprouve le maïs.


Quoique le maïs croisse & mûrisse recouvert d’une enveloppe épaisse, qui sert à le garantir de l’action immédiate du soleil, de la pluie, du froid & des animaux destructeurs, c’est à tort & contre l’expérience qu’on l’a présenté comme exempt de tout danger. Il ne faut que jeter un coup d’œil sur la structure de cette plante, pour juger que les intempéries des saisons influent essentiellement sur sa récolte, & que rien n’est plus important pour le cultivateur de maïs, qu’une pluie douce, ou les arrosemens qui y suppléent, accompagnés d’une chaleur tempérée.

S’il survient des chaleurs continues, sans être en même temps accompagnées de pluie, la végétation du maïs languit ; c’est alors qu’il faut prendre garde de trop remuer la terre, dans la crainte que le pied de la racine ne se dessèche. Trois semaines ou un mois au plus de sécheresse, sont capables de diminuer considérablement les récoltes, à moins que le terrein ne puisse être arrosé par des canaux, comme dans quelques cantons de l’Italie ; mais on doit administrer ces arrosages avec prudence, & ne s’en servir que quand on s’aperçoit que la plante souffre visiblement, & que même les feuilles commencent à se flétrir.

Le maïs semé dans les terres voisines des rivières, & exposées au débordement, à l’instant même où la plantule se développe, court les risques d’être entièrement perdu, parce que l’eau échauffée par l’action du soleil, en dessèche le cœur ou le centre alors fort tendre. Une partie de la récolte est encore également perdue par les pluies abondantes ; mais cet accident est moins à craindre dans les terres sèches & légères.