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tances propres aux labours. (Voyez ced mot)

Toute espèce d’engrais convient au lin, pourvu qu’il soit bien consommé. L’engrais encore pailleux, & nouvellement fait, est bien peu utile, & souvent il s’oppose à la herse qui doit unir la surface du champ. D’ailleurs la combinaison savonneuse des principes graisseux, huileux & salins de l’engrais, n’est pas établie, & ne peut qu’à la longue s’établir avec les principes du sol, tandis que le lin exige une prompte & succulente nourriture. Pour juger de la nécessité de cette combinaison savonneuse, lisez les articles Amendemens, Engrais. Si on a le choix des engrais, les excrémens humains, les urines conservées dans des marres, sont à préférer à tous les autres. Au défaut de ceux-ci, ceux de moutons, de chèvres, tiennent le second rang, & après eux, celui du cheval, du mulet ; enfin, celui de vache. La colombine, réduite en poussière, & semée à la volée sur le champ, est excellente : on peut même la réserver pour la semer sur les lins hivernaux, en janvier ou en février, lorsque le temps est disposé à la pluie.

La chaux, la marne, les cendres, les deux premiers sur-tout, fournissent de bons amendemens dans les terres fortes, tenaces ; le sable, dans ce cas, n’est pas à négliger. La chaux & la marne doivent être jetées en terre avant le premier labour d’hiver, afin qu’il enterre ces substances ; afin que les pluies les dissolvent ; enfin, pour que la combinaison savonneuse soit faite au moment où l’on confie la semence à la terre. Les effets de la marne sont plus tardifs que ceux de la chaux.

J’insiste fortement sur la nécessité des engrais ; mais les meilleurs & les plus abondans produiront peu d’effets, si le sol n’est profondément défoncé avant de semer. Combien doit-on donner de labours ? Il n’est pas possible d’en prescrire le nombre ; c’est la ténacité du grain de terre qui le décide. Il faut que la terre soit émiettée comme celle d’un jardin. Cela seul doit décider du nombre des labours. Ceux qu’on donnera avant l’hiver, pour les lins à semer au printemps, prépareront cette division, & amélioreront le sol. (Voyez l’article Labour)

Les Flamands, les Artésiens sont dans l’habitude de diviser leurs champs par tables, & tout autour d’ouvrir une espèce de petit fossé ; la terre qu’ils en retirent est rejetée sur le sol de ces tables. Ces fossés servent à deux fins ; à écouler l’eau lorsqu’elle est trop abondante, ou à la retenir, en fermant la bouche du fossé, après les pluies du printemps ou de l’été. De cette manière il se trouve toujours assez d’humidité pour les racines. Cette méthode peut être très-utile dans les provinces du centre du royaume, & défectueuse dans celles du midi, puisque les pluies y sont excessivement rares depuis le mois de mai jusqu’à l’automne.

III. Du choix de la graine. L’expérience la plus constante a démontré que la graine de lin, semée trois fois de suite dans le même sol, ou dans le même canton, dégénère ; enfin, qu’il est indispensable de la renouveller. Les habitans des côtes maritimes s’en procurent facilement par le moyen des Hollandois qui la transportent dans tous nos ports. La