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M. Descombes l’appelle la reine des laitues : elle mérite ce nom par sa grosseur monstrueuse, sur-tout en Hollande ; sa pomme est très-serrée, & sa saveur est douce & sucrée lorsque le terrein & le climat lui conviennent. Dans les provinces du nord elle demande à être semée de bonne heure & sur couche, si on veut en recueillir la graine qui est blanche, en forme de navette, sillonnée, pointue à son extrémité, & légèrement tronquée à sa base. Cette laitue reste longtemps à faire sa pomme, & monte très-difficilement. On peut la replanter jusqu’à la fin de juillet dans les provinces méridionales ; après ce temps elle ne pomme plus ; & dans celles du nord, le commencement de juin est la dernière époque de la replantation. Les premières feuilles basses & extérieures de cette laitue sont très-grandes, lisses, d’un verd pâle & terne, & souvent il sort de leurs aisselles des drageons qu’il faut retrancher. Sa pomme est de couleur jaune, & le véritable temps de la manger est le printemps. On la replante à quatorze ou quinze pouces de distance, en tout sens. Pendant les grandes chaleurs si on arrose trop souvent, la plante se fond. De toutes les espèces de laitues, c’est celle que l’on doit préférer dans les provinces méridionales, parce qu’elle craint moins la sécheresse que les autres, & sur tout parce qu’elle monte difficilement[1].

La laitue cocasseLactuca multi folia è viridi sub rubescente, tumide crispatas capite majore, semine albo. Sa graine est blanche, plus alongée, plus pointue que celle de la précédente, & ses sillons moins caractérisés. Elle aime un terrein léger, substantiel & bien terrauté, & beaucoup d’arrosemens. Elle est un peu amère, & médiocrement tendre ; cependant les jardiniers paroissent la préférer à toute autre pour l’été, parce que sa pomme est grosse & se soutient long-temps en cet état avant de monter en graine ; il faut même fendre la pomme afin que la tige s’élance d’entre les feuilles découpées, fleurisse & graine. Ses feuilles extérieures sont de couleur verte-foncée, luisantes & très-cloquetées. Si on la seme en août elle passe très-bien l’hiver en pleine terre, sur-tout dans les provinces méridionales. Elle réussit mal dans les terreins forts & tenaces. Dans les provinces du nord, si on veut en avoir la graine, on doit l’élever sur couche.

La versailles paroît être, au rapport de l’auteur du nouveau la Quintinie, une variété de la cocasse ; elle est, ajoute-t-il, de même grandeur & à peu-près de même qualité ; la tête est un peu applatie, moins amère, moins garnie de feuilles, se soutenant aussi long-temps dans les chaleurs, & montant aussi difficilement en graines ; elle est blanche. Ses feuilles sont d’un verd plus clair sans mélange

  1. Lorsque j’indique une époque, par exemple, un mois pour semer, c’est en général ; je l’ai déjà dit & je le répète, il n’est pas possible d’établir une loi invariable ; chacun doit faire des essais, étudier son climat, sa position ; enfin, pour avoir une certitude, semer les mêmes graines à chaque mois de l’année, & observer attentivement la manière, d’être de l’atmosphère. À la fin de février ou au commencement du mois de mars, on doit semer dans les provinces du midi toutes les laitues d’été.