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emploie la chaleur, ou les acides, ou les alkalis.

II. De la manière de retirer le lait des mamelles des animaux. Les détails dans lesquels je vais entrer, sont minucieux en apparence, & non pas dans la réalité, puisque l’abondance ou l’exsication du lait tient à plusieurs causes.

Lorsqu’on a privé la mère de son petit quelque temps après qu’elle a mis bas, les tétines se remplissent, se gorgent, & deviennent douloureuses, si on ne trait pas l’animal : livré à lui-même, il souffre, & peu à peu le lait tarit, ce qui détruit le profit que le propriétaire est en droit d’en attendre & d’en retirer ; mais si l’animal est bien soigné, il donnera du lait jusqu’à ce qu’on le fasse couvrir de nouveau, souvent même presque jusqu’au moment de mettre bas. Quoique ce cas ne soit pas rare, il vaut beaucoup mieux ne pas demander à l’animal une liqueur peu saine alors, & dont la soustraction nuit à la mère & au petit.

Si on veut qu’une vache, qu’une ânesse, &c. donne du lait en abondance & pendant long-temps, on doit la traire à des heures réglées, à des distances égales, deux fois par jour, & non pas trois fois, comme on le pratique en certains endroits, ou un peu chaque fois à diverses reprises dans la journée. Il faut cependant convenir que lorsque l’animal a mis bas depuis peu de temps, & lorsque le lait est bien abondant, il est nécessaire de traire trois fois par jour ; mais cette exception ne détruit pas la règle générale ; elle dépend beaucoup de la qualité de l’individu particulier de l’animal, & des herbages dont il est nourri.

Il résulte du premier régime que la nature dans la formation du lait, suit une marche réglée, & elle en fournit en plus grande quantité. Par les autres au contraire elle est sans cesse contrariée, & insensiblement le lait tarit.

Le second avantage tient à l’envie & au besoin où l’animal se trouve de donner son lait. Lorsqu’il est réglé, il attend avec inquiétude le moment du trait, afin d’être soulagé du poids qui fatigue ses tétines alors il se présente de lui-même au seau ou baquet destiné à recevoir le lait, sur-tout si après l’opération, la trayeuse a la coutume de lui donner à manger. Une personne mal habile fatigue souvent l’animal ; elle le brusque ou le bat. Ces mauvais traitemens le rendent revêche, difficile à gouverner il redoute un moment qui devroit être pour lui plutôt sensuel que pénible, puisque le trait est un besoin réel.

La trayeuse doit manier doucement les tettines, les caresser, les presser du haut en bas, & traire jusqu’à ce qu’elles aient donné tout leur lait ; mais elle ne commencera réellement à traire que lorsqu’elle verra l’animal tranquille. Sans cette petite précaution, le seau seroit bientôt renversé & le lait perdu.

Si on néglige de traire jusqu’à la dernière goutte, si on trait à différentes reprises dans le jour, & tantôt à une heure ou à une autre, on verra insensiblement diminuer la quantité du lait, & enfin les mammelles devenir sèches. Le propriétaire qui ne voit rien, ou qui s’en rapporte trop facilement à ses valets ou aux personnes chargées de la laiterie, se plaint du peu de produit de l’ani-