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d’excellens effets, & les rigoles ne demandent ni le même nombre, ni la même profondeur. Dans l’un & dans l’autre cas, pour peu que le champ ait une certaine étendue, on fera très-bien d’avoir des rigoles générales à demeure, c’est-à-dire qu’on ne les changera pas, mais seulement les rigoles partielles. Si on le sème en gazon, si on forme une platte bande de chaque côté & de six à huit pouces de largeur, on doit être assuré qu’il ne se formera jamais des trouées ni des ravins, à moins d’un cas extraordinaire. Il est bon cependant d’en nettoyer le fond au besoin, parce que l’herbe retient la terre charriée par les eaux ; ce fond s’élève, & bientôt il se trouve de niveau avec les côtés ; alors ces rigoles ne sont plus d’aucune utilité : elles demandent à être souvent visitées, afin de prévenir les engorgemens, & la terre qu’on en retire, doit être jetée sur le bord du côté supérieur.

Les champs à plan incliné, soit du côté du levant, soit du côté du midi, sont moins sujets aux mauvaises herbes que ceux inclinés des deux autres côtés (toute circonstance égale) ; ils demandent à être labourés & semés de bonne heure, parce qu’ils craignent beaucoup la sécheresse & la chaleur, relativement au climat & en raison de leur inclinaison, qui les met dans le cas de recevoir plus perpendiculairement les rayons du soleil.

Il ne reste plus qu’une seule observation à faire, relative aux champs inclinés, & elle est de conséquence. Après que tout le champ est labouré en plein, soit après le premier, le second, enfin, après chaque labour, on doit tracer & ouvrir les rigoles comme s’il venoit d’être semé. Il est aisé de sentir que sur cette terre fraîchement retournée, s’il survient une grosse pluie, une pluie d’orage, elle sera promptement entraînée du haut en bas ; au lieu que les rigoles détourneront les eaux, & préviendront les dégradations. C’est une mauvaise nature de bien que celle des champs ainsi inclinés, à moins qu’ils ne soient convertis en prairies ou en bois ; & encore, pendant les premières années, la prudence exige qu’on ait le plus grand soin des rigoles… Règle générale, plus un terrein est incliné, plus le sol en est maigre, moins il doit être labouré souvent. Dans le premier cas, la terre est emportée, & dans le second, on l’appauvrit encore, & l’on diminue sa qualité végétative par la grande évaporation de ses principes, & sur-tout de son air fixe (Voyez ce mot).


Section II.

Dans quelles circonstances doit-on labourer ?


Les méthodes ordinaires & admises dans presque tout le royaume, laissent rarement le choix des circonstances, à cause que l’on n’est jamais assez fort en bestiaux & en valets : on laboure, quand on peut, pendant toute l’année, & l’on est forcé de travailler pendant les grandes chaleurs. Celle que j’ai proposée précédemment, assure une liberté entière. En effet, il m’importe peu avant l’hiver que la terre soit mouillée (elle ne peut-être trop sèche dans cette saison), que la charrue la soulève par bandes tenaces dans un sol fort ou argilleux ; n’ai-je pas la