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cette fermentation intestine qui décompose les substances animales & végétales, & qui de leur décomposition prépare la terre végétale, & la combine avec les matériaux de la sève ; 2°. ils causeront une évaporation sensible, & très-sensible, des principes de la terre.

On niera peut-être cette seconde assertion ; mais que répondre à ces points de fait ? Le dépôt de rosée est plus abondant sur un champ bien labouré, que sur celui qui ne l’est pas (toute circonstance égale de champ à champ, ce dernier supposé dépouillé d’herbes). Or, la rosée est plus fortement attirée par ce premier champ. Il y aura donc au lever du soleil, & pendant sa vive action dans la journée, une plus forte évaporation ? La preuve en est que tous les fluides doivent se mettre en équilibre, & que l’eau contenue entre les molécules de la terre, doit se sublimer en raison de la chaleur qui l’attire ; & cette attraction de l’air fixe & de l’humidité intérieure, est encore aiguillonnée par l’évaporation de la rosée qui donne, si je puis m’exprimer ainsi, des aîles aux deux autres. En effet, une terre labourée sèche bien plus vite qu’une terre qui ne l’est pas ; & sa siccité dépend de la plus grande évaporation. Voici une preuve plus forte encore : dans un jour très-chaud d’été, & lorsque le soleil est près du milieu de son cours, placez-vous de manière qu’une grande partie du champ, fortement labouré, soit horisontale à votre vue, & vous apercevrez à la hauteur de deux à trois pieds au-dessus de la surface du sol, une scintillation très-vive, très-sémillante : mettez-vous dans la même position vers un champ non labouré ou anciennement labouré, l’activité de cette scintillation sera bien moins forte. Quelle est donc la matière de cette scintillation, sinon celle des vapeurs qui se subliment ? Dira-t-on qu’elle tient simplement à la réverbération des rayons du soleil ? Si cela étoit, un champ non labouré les réfléchiroit beaucoup mieux. En effet, il les réfléchit mieux, ainsi que tous les corps durs ; mais on n’y remarque pas la même scintillation. La terre nouvellement labourée est plus brune que celle qui l’est depuis long-temps, elle doit donc absorber beaucoup plus de rayons solaires, s’échauffer davantage (Voyez le mot chaleur), & produire moins de scintillement, & c’est précisément tout le contraire, ils y sont plus hauts & plus abondans… Les labours faits pendant les grosses chaleurs sont plus nuisibles qu’utiles, sur-tout s’ils sont souvent répétés. Ces principes paroissent en contradiction avec ce vieux & utile proverbe : labour d’été vaut fumier. Mais il s’agit de s’entendre : les proverbes ne seroient pas devenus tels, s’ils n’étoient fondés sur l’expérience. Ce labour vaut fumier, parce qu’il accélère la décomposition des substances animales & végétales, & sur-tout parce qu’il enfouit beaucoup d’herbes prêtes à grainer, & qui auront le temps de pourrir avant les semailles ; mais si on laboure à plusieurs reprises consécutives, afin de rendre la terre du champ meuble comme celle d’un jardin, on épuise cette terre, & le mal ne peut se réparer que par les engrais. Il n’est pas encore temps de songer à cette grande division. On ne doit jusqu’à ce moment avoir en vue,