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le froid, au contraire, les condense, il les rend plus compactes, & par conséquent plus spécifiquement plus pesans. Plus le froid est vif, plus le degré de condensation est grand. Les corps les plus durs, comme les métaux & les pierres, sont soumis à cette loi. L’eau & les liqueurs y obéissent aussi jusqu’au moment qui précède leur congélation ; mais en se gelant & lorsqu’elles sont gelées, elles semblent s’éloigner de la règle commune, puisqu’elles se dilatent sensiblement, & diminuent de pesanteur spécifique ; c’est pour cette raison que la glace surnage l’eau dans laquelle elle s’est formée. Les huiles, les graisses, la cire, les métaux même en fusion, excepté le fer, suivant M. de Réaumur, rendus fluides par l’action du feu, se condensent à mesure qu’ils se refroidissent ; le froid devient un espèce de lien pour certains corps, il leur donne de la fermeté & de la consistance : s’il augmente la solidité des corps durs, il diminue la fluidité des liquides, & il les rend même presque tous solides. Tels sont les effets généraux du froid ; il en produit de moindres, mais qui dérivent des principaux, & qui dépendent & de son intensité, & des diverses circonstances.

D’après tous ces effets, il est assez naturel de conclure que le froid n’est qu’une diminution de la chaleur, & que le froid absolu seroit sa privation totale, la négation du feu & de la chaleur. Cette explication est infiniment plus simple, plus naturelle, & résout mieux tous les phénomènes que tous les systèmes que l’on a imaginés, dans lesquels on a considéré le froid comme un être physique & particulier, & dans ceux-mêmes où on a regardé le froid comme une propriété de certains corpuscules frigorifiques absolument différens par leur nature & leur configuration, des molécules ignées qui, dans ces systèmes, tétoient les principes de la chaleur.

Tout s’expliquant de soi-même dans la théorie que nous avons adoptée, nous allons parler des causes qui opèrent le refroidissement des corps, ou, ce qui est la même chose, qui en diminue la chaleur. Ces causes sont très-multipliées ; les unes purement naturelles agissent d’elles-mêmes & en certaines circonstances, & les autres attendent pour avoir leur effet, qu’elles soient mises en action par l’industrie humaine, comme pour la chaleur. De-là deux divisions du froid, le froid naturel & le froid artificiel.

§. II. Du froid naturel ou atmosphérique. La chaleur naturelle, comme nous l’avons démontré au mot Chaleur, étant produite par les rayons du soleil, tout ce qui pourra diminuer ou arrêter leur action, contribuera à donner du froid. Il s’agit ici du froid atmosphérique qui se communique plus ou moins à tous les corps. Trois grandes causes paroissent y influer principalement ; la situation particulière des lieux, la nature du terrain, l’élévation ou la suppression de certaines vapeurs, & les vents.

1°. Situation des lieux. Tous les pays placés au même degré de latitude devroient avoir la même température, puisqu’ils sont également éloignés des pôles ; mais il s’en faut de