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pour qu’une partie de l’oignon, au-dessus du cercle des racines, y baigne. Il ne s’agit plus que de renouveler cette eau de quatre en quatre semaines ; quelques personnes jettent, tous les quinze jours, dans l’eau une pincée de nitre. On voit profiter les racines & la tige, & quand on en a beaucoup en fleurs, on peut les ranger sur un théâtre.

Ces caraffes réussissent très-bien sur les tablettes des cheminées où l’on fait habituellement du feu. Cependant, si la chaleur de ces tablettes devient assez forte pour échauffer sensiblement l’eau, cette liqueur se décompose, contracte une mauvaise odeur, les racines se pourrissent, augmentent l’infection, & la plante périt sans avoir fleuri. Lors donc que l’on fait grand feu, on doit être attentif à renouveler souvent l’eau des caraffes.

Il y a des personnes qui distribuent les caraffes en divers endroits d’une chambre où l’on entretient une chaudière d’eau bouillante, dont la vapeur contribue beaucoup à la réussite des jacinthes, soit en se répandant sur elles en forme de rosée douce & très-fine, soit en entretenant l’air dans une température proportionnée à celle qui est favorable à leurs progrès.

Les oignons qui ont ainsi fleuri en hiver, étant ensuite mis en terre, puis levés dans la même saison que les autres, y reprennent de la vigueur, mais il ne sont pas en état de donner une seconde fois cet agrément ; tout ce que l’on a droit d’en attendre, est que l’année suivante, ils jetteront quantité de cayeux.

On voit donc que la culture des jacinthes n’a pas plus de difficultés & d’inconvéniens que celle des tulipes ou des oreilles d’ours.

Les jacinthes peuvent être cultivées avec succès dans toute l’Europe, quoiqu’en général un climat tempéré soit celui qui leur convient le mieux : elles réussissent très-bien en Italie, & particulièrement à Rome, où il y a des curieux qui le disputent en ce genre aux Hollandois. La France embrassant dans son étendue différens climats, de chauds, de froids, & son climat principal étant tempéré, elle possède de grands avantages pour la culture de cette belle fleur. Les Hollandois, sous un ciel moins favorable, ne priment sur les François que par leur application laborieuse & intelligente au moyen d’étuves ou serres chaudes, les pays septentrionaux peuvent se procurer la même jouissance.


Section IV.

Des maladies des Jacinthes.


Les plantes sont, sujettes 1°. à une espèce de chancre caractérisé par un cercle ou demi-cercle brun, ou couleur de feuille morte, qui s’étend depuis la surface dans tout l’intérieur de l’oignon, & répond à la couronne des racines : c’est une corruption dans les sucs de l’oignon. Quand le mal n’a pas fait de grands progrès, il n’occupe qu’une partie de l’oignon, & on s’en apperçoit rarement tandis que la plante est en terre, en sorte qu’on est surpris de trouver ce vice en levant telle jacinthe qui aura bien fait dans la même année ; mais dès que le cercle est entièrement formé, la maladie est mortelle ; l’oignon ne profite plus, & l’état de sa fane au printemps