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avec art, on se procure le spectacle d’un champ ou d’un coteau couvert de fleurs. C’est un agrément qu’on ne peut pas attendre de la jacinthe pleine. Pour avoir une jouissance complette, il faut donc cultiver des pleines & des simples, afin que les plus hâtives transmettent, jusqu’aux plus tardives, une succession de fleurs dans leur beauté.


Section III.

De la Culture.


En général, il faut éloigner tout ce qui a seulement quelque rapport avec du fumier frais… Les terres crétacées & argileuses, sont absolument contraires aux jacinthes. M. Van-Zompel dit avoir vu cultiver avec succès la jacinthe aux environs d’Amsterdam, dans des terrains qu’il qualifie de sulfureux. Pour ce qui est de la terre sablonneuse, il la regarde comme la plus convenable aux jacinthes, pourvu qu’on ait soin d’en ôter le sable rouge, le jaune, le blanc & le maigre ; le meilleur sable, ajoute-t-il, est le gros, lorsqu’il est un peu gluant, gras, & qu’il ne se convertit pas en poussière jaune à mesure qu’il se sèche. La terre sablonneuse qu’il recommande est grise ou de couleur fauve noirâtre, & l’eau qui en découle est douce ; au moins, dit-il, tel est le sol des environs de Harlem, si favorable aux jacinthes.

Quant aux amendemens, les curures récentes des fossés ou des puits ne peuvent que nuire à l’ameublissement de la terre. Le fumier de cheval, de brebis, de porc, capable de hâter le progrès des plantes, occasionne des chancres pernicieux aux oignons. La poudrette, de quelque nature qu’elle soit, & toutes les préparations recherchées ne sont point ici de mise. Le seul fumier de vache suffit pour mettre cette sorte de terre en état de nourrir de belles jacinthes. On peut y substituer les feuilles d’arbres bien consommées,[1] ou le tan réduit en terreau, à force d’avoir servi à d’autres usages dans le jardin… Il y a des gens qui élèvent leurs jacinthes sans terre, dans un mélange de moitié fumier de vache, & moitié feuilles & tan bien consommés. On travaille ce mélange pendant deux ans, & la réussite est aussi certaine que dans les sables gris, pourvu que le tan ait été tiré des fosses deux ans avant de le mêler avec du fumier, ensorte qu’il soit déjà à demi-consommé. Le monceau de ce mélange, ainsi que de tout autre, doit être placé au grand soleil. On indique, comme très-bonne, une composition bien simple, c’est de prendre trois parties de terre neuve, ou de taupinière ; deux parties de débris de couche bien terreautées, & une partie de sable de rivière.

D’autres exigent une terre de potager ordinaire, d’un demi-pied de profondeur.

Quand on fait des monceaux de fumier, mélangés de terre, pour se

  1. Note de l’Éditeur. J’ai vu, chez un fleuriste, une planche entière de jacinthes languir ou périr, pour avoir employé des feuilles de noyer à la préparation du terrain.