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çà & là des pieds dans les jardins, & sur-tout dans le voisinage des arbres fruitiers. Comme cet arbrisseau talle beaucoup par ses racines, par ses drageons, il s’empare bientôt de tout le terrain, effritte singulièrement la terre, & nuit beaucoup aux arbres voisins. Laissons donc ce parasite vivre seul dans le sol qu’on lui sacrifiera.

Sur ce terrain, ouvrez, de quatre en quatre pieds, des fossés d’un pied de profondeur & de largeur ; donnez au fond un fort coup de bêche, afin que les racines nouvelles qui pousseront, trouvant une terre meuble, s’enfoncent plus profondément sur cette terre, &, de quatre pieds en quatre pieds, étendez les racines de l’arbrisseau, & remplissez la fosse de la terre qu’on en a retirée ; coupez ensuite la tige à trois ou quatre pouces au-dessus du sol.

La distance prescrite entre chaque pied, paroîtra, au premier coup-d’œil, trop considérable ; mais on jugera bien autrement à la fin de la seconde ou troisième année, quoiqu’on ait eu le soin de retrancher les bourgeons qui sortent de terre de toutes parts, cet espace permet de les bien travailler, & de conserver un plus grand nombre de tiges autour du principal pied, afin de remplacer ceux qui périssent, ou pour faire de nouvelles plantations.

Beaucoup de tiges qui ont porté fruit, meurent ensuite, & non pas chaque année, comme l’ont avancé plusieurs écrivains sur le jardinage ; puisque j’ai sous les yeux, des tiges qui subsistent depuis trois ans, & que je conserve exprès, afin de voir pendant combien de temps elles subsisteront encore. On doit avouer cependant que ces tiges anciennes donnent de petits fruits, moins nourris que ceux des tiges de l’année précédente, mais plus parfumés. Je crois pouvoir avancer que la mortalité des tiges anciennes, est en raison de la multiplicité des drageons qui sortent de terre ; plus il y en a de nouveaux, & plus il meurt de tiges anciennes.

Peu de jours après que les premières gelées ont fait tomber les feuilles, l’amateur doit faire donner un labour aux framboisiers, & l’ouvrier en même temps arrachera les drageons superflus, conservera deux, trois ou quatre tiges de l’année précédente, supprimera celles qui ont déjà donné du fruit ; sur quatre tiges, il en rabaissera deux à la longueur d’un pied, & conservera les deux plus fortes. Je ne limite pas strictement le nombre de ces tiges à celui de quatre, la vigueur du pied doit le fixer ; il s’agit ici des généralités : les tiges laissées entières donneront plus de fruits, & celles rabaissées, de plus beaux fruits.

On dit que le framboisier n’exige ni engrais ni fumier : cette proposition est trop générale. Les engrais diminuent le parfum de son fruit ; mais je puis certifier qu’ils contribuent beaucoup à lui procurer une plus forte végétation.

Propriétés. Les feuilles sont légèrement âpres ; les fruits acides, agréables au goût & à l’odorat ; ils nourrissent peu, développent beaucoup d’air dans les premières voies, causent souvent des coliques ; le sucre qu’on y ajoute, est leur correctif. Si on veut s’en servir comme remède, il vaut mieux préférer les fraises.