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mortification qu’il ne manqueroit pas d’avancer par la saignée ; mais en combinant tous les symptômes, en les confrontant avec ce qui a précédé la maladie, le médecin vétérinaire instruit saura toujours fixer son indication.

La pléthore n’est pas le seul cas qui demande les saignées répétées, pour obvier à la mortification dont une partie est menacée ; la constitution âcre & phlogistique de la masse du sang, sa déterminaison trop forte vers la partie enflammée, sont d’autres circonstances qui exigent qu’on multiplie également les saignées. La dureté, l’amplitude, la vitesse du pouls, la puanteur des excrémens, l’odeur vireuse des sueurs, & de l’insensible transpiration, l’état lixiviel des urines, leur fétidité, leur transparence jointe à une couleur orangée, la chaleur de la peau, principalement de la partie affectée, sont autant de marques auxquelles on peut reconnoître cet état.

Dans celui-ci, on ouvre les veines des extrémités les plus éloignées du siège du mal, pour produire une diversion qui écarte le sang de la partie affectée, vers laquelle il se porte abondamment, & l’on s’applique particulièrement à corriger la phlogose du sang par l’usage des rafraîchissans du genre des tempérans. Ainsi, on retranche tout aliment solide à l’animal malade ; on le nourrit d’eau blanchie avec le son de froment, ou avec la farine d’orge, de seigle ; d’heure en heure, on lui fait boire de la tisane de pissenlit, adoucie avec le réglisse, & chargée de deux gros de nitre par pinte, les tisanes des feuilles, tiges & racines d’oseille, d’alleluia, auxquelles on ajoute le sirop de nénufar, l’esprit de vitriol, le cristal minéral, ou la crème de tartre.

La différence des circonstances détermine quels sont, entre les rafraîchissans, ceux qu’il faut employer. Si l’animal est constipé, on s’abstient de l’usage des acides minéraux, & l’on se sert de la crème de tartre ; s’il y a disposition aux sueurs, le vinaigre, les fortes infusions de fleurs de sureau doivent être préférées. S’aperçoit-on que les urines ne passent point en proportion de ce que l’animal boit, sans que cette évacuation soit suppléée par quelqu’autre ? on ranime l’action des reins par le nitre dépuré, par son esprit, par celui de sel marin. Si le ventre est trop libre, ou météorisé, le pouls très-lâche, les humeurs fort dissoutes, c’est au suc d’épine-vinette, de grenade, à l’esprit de soufre ou de vitriol, au sel d’alleluia qu’il faut recourir.

On sait que la rigidité naturelle des fibres est la principale cause de l’inflammation. Quand la tumeur inflammatoire, qui est accompagnée des douleurs les plus aiguës, a peu d’enflure, la maigreur de l’animal, la dureté extraordinaire de son pouls, la vivacité de son humeur, aident à former ce diagnostic ; ici on règle le nombre des saignées d’après l’abondance du sang dans l’état de santé, &, sans négliger les rafraîchissans dont nous venons de parler, on agit principalement par tout ce qui peut assouplir les fibres trop roides, les bains tièdes, les fomentations avec la décoction des substances farineuses, les cataplasmes savonneux, les embrocations de vinaigre mo-