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pas à paroisse, & qui peut être très-salutaire.

L’indigestion grave n’exclut point tous les symptômes dont on vient de faire mention. Outre ceux-là, elle est accompagnée de gonflement considérable du bas-ventre, de douleur, de colique très-aiguë, de délire, de convulsion, d’assoupissement & de fièvre.

Les causes qui peuvent disposer & exciter l’indigestion, sont de deux sortes ; les unes sont internes, les autres externes. Dans les premières, on doit comprendre le peu d’énergie des organes digestifs, leur faiblesse & leur défaut de ressort. Le vice des humeurs qui concourent à la digestion, vice qui peut consister dans la mauvaise qualité des sucs gastrique & pancréatique, & dans celle de la bile, qui se séparant trop lentement dans le foie, est trop tard, & en trop petite quantité, versée dans l’intestin duodenum. On doit y joindre encore l’érétisme de l’estomac, la trop grande sensibilité de ce viscère, & une surcharge de matières indigestes.

Dans les causes externes, nous renfermerons le défaut d’exercice, un embonpoint extrême, une fatigue excessive, le défaut de sommeil, une compression trop forte faite sur l’estomac immédiatement après le repas, des coups violens portés sur ce viscère, enfin un excès dans le manger, & l’usage abusif de viandes pesantes, dures, coriaces, & de difficile digestion.

Parmi toutes ces causes, je n’en connois pas de plus puissante que le dégoût que certaines personnes éprouvent à la vue de certains mets ; par exemple, du riz, du poisson, &c. L’estomac de plusieurs personnes ne s’accommode point avec des viandes salées, épicées, & fumées ; elles les vomissent un instant après les avoir avalées. D’après cela, il est aisé de voir que cette maladie dépend quelquefois de l’ydiosincratie de certains sujets.

Pour pouvoir combattre avec succès cette maladie, le médecin doit plutôt tâcher d’en découvrir la cause. L’indigestion, quelque légère qu’elle puisse être, est susceptible d’un traitement méthodique. D’après ce principe, dans une indigestion quelconque, on ne doit pas avoir recours, comme on le pratique presque toujours, aux odeurs très-fortes, aux liqueurs spiritueuses, & aux eaux cordiales ; ces remèdes incendiaires sont plus nuisibles que salutaires, & ne font qu’aggraver le mal, en allumant la fièvre, & en excitant un degré de chaleur qui accable les malades, lors sur-tout que cette maladie dépend du choc des passions, de la tension des fibres de l’estomac ; leur emploi ne peut avoir lieu que lorsque la maladie a pour cause une foiblesse naturelle ou accidentelle de l’estomac, & un abattement des forces.

On remédiera à l’indigestion par surcharge putride dans l’estomac & les premières voies, en faisant boire beaucoup d’eau tiède aux malades, afin de provoquer le vomissement, qui communément emporte avec lui la cause & les effets. Si, malgré cette quantité d’eau chaude, le vomissement ne survient pas, on doit alors donner au malade, en deux prises, la dissolution de deux grains de tartre émétique dans un verre d’eau commune, ou tout autre