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constance tout ce qui lui en présente l’apparence.

On a quelquefois assez de peine à faire passer le goût de couver aux poules qui l’annoncent. On leur donne une nourriture rafraîchissante ; on les baigne même pour éteindre leur ardeur. Nous ne donnons pas pour bien certain le moyen qu’on emploie, en quelques provinces, de leur passer une plume par les naseaux. On prétend cependant, dans un grand nombre de livres qui traitent de l’économie rurale, que ce moyen est infaillible.

Les autres oiseaux ne font pas voir moins d’ardeur que la poule pour couver les œufs qu’ils ont pondus, ou ceux mêmes qu’on substitue dans leurs nids. L’histoire du coucou est connue. On sait que cet oiseau va pondre dans un nid étranger, & qu’il est en possession de donner à ses petits un père & une mère adoptifs.

Rien de si commun dans nos basses cours, que de voir des œufs d’une espèce, couvés par des oiseaux d’une autre espèce. La canne & la poule couvent indifféremment leurs œufs respectifs. La dinde qui est naturellement patiente & excellente couveuse, a souvent l’emploi de couver des œufs qui lui sont étrangers.

La durée de l’incubation n’est pas la même pour toutes les espèces d’oiseaux. En général, les petites espèces couvent leurs œufs pendant un temps beaucoup moins long que les grandes. La couvée des serins, linotes, chardonnerets, moineaux, &c, est de douze à treize jours, celle des pigeons de dix-huit, celle des poules de vingt à vingt-un, celle des cannes, oies, dindes, &c. d’un mois environ : l’aigle & apparemment les plus grands oiseaux n’en mettent pas davantage à la leur.

Il y a néanmoins des exceptions à ces loix ; la nature ne marche jamais sur une ligne mathématique. Les temps que nous venons d’assigner à chaque espèce, sont les temps moyens & ordinaires des couvées : quelques individus éclosent beaucoup plutôt, d’autres un peu plus tard que le commun des oiseaux de leur classe.

Nous ne connoissons pas de fait plus extraordinaire à cet égard que celui que rapporte M. d’Arcet dans le Journal économique, Janvier 1767. Ce médecin assure qu’il a suivi la couvée d’une poule dont les poussins sont éclos, un à treize jours, un à dix-sept, un à dix-huit & cinq autres du dix-neuf au vingtième jours.

La constance des couveuses dans toutes les espèces, est véritablement admirable : elles varient beaucoup dans la construction & dans l’emplacement de leurs nids ; (Voyez Nid) ; mais toutes font voir la même affection, la même patience dans une fonction qui paroît si ennuyeuse & si fatigante. Les couveuses en perdent, à la lettre, le boire & le manger. Les poules & les dindes périroient souvent sur leurs œufs, si on n’avoit l’attention de les retirer du nid pour leur faire prendre de la nourriture & pour leur donner le temps de se vider.

Dans les espèces qui vivent en liberté, c’est le mâle qui se charge de pourvoir aux besoins de la mère : celle-ci, par ce moyen, ne fait jamais que des absences fort courtes. Il y a des espèces, comme celle des pigeons, des moineaux, &c., où