Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1784, tome 5.djvu/645

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour les combattre. Ils querellent tantôt leurs médecins, & tantôt ils les fatiguent par des demandes & des répétitions ennuyeuses. Ils sont fort chagrins sur l’événement & la terminaison de leur maladie ; nulle autre chose ne les occupe, & ils s’embarrassent peu de tout le reste.

Outre les vents dont ils sont tourmentés, ils éprouvent de grandes douleurs dans l’estomac & de fréquentes cardialgies. Ils ont les hypocondres fort tendus & gonflés ; ils ressentent dans les entrailles un sentiment de douleur très-aiguë ; leur appétit est vicié, ils ont du goût pour des alimens de mauvaise qualité & qu’ils digèrent très-mal ; c’est aussi ce qui leur occasionne de fréquens rapports, des borborygmes, des nausées, le vomissement des matières acides, âcres, bilieuses & atrabilaires ; ils vont difficilement à la selle ; leur sommeil est interrompu ; c’est ce qui les fait tomber dans un état de maigreur, de sécheresse & de marasme, & qui donne à leur peau une certaine crasse, une malpropreté dégoûtante, & à leur visage, une couleur brune.

Les urines qu’ils rendent sont blanchâtres, quelquefois fort claires & abondantes, & très-souvent noires ; la timidité, la crainte & la peur sont inséparables de leur état ; la tristesse, une mélancolie affreuse, & beaucoup de frayeur troublent presque sans cesse leur imagination ; les symptômes qui se manifestent dans le paroxysme, sont des spasmes dans tout le corps, & sur-tout à la gorge ; la déglutition est interrompue ; les convulsions surviennent ; le tremblement, l’engourdissement de toutes les parties, le hoquet s’y joint, les larmes coulent, elles sont toujours l’annonce de la fin du paroxysme.

Cette maladie peut être l’effet d’une grande application à une étude sérieuse & très-réfléchie. Les chagrins, les peines d’esprit peuvent la déterminer ; elle peut être occasionnée par la suppression des règles & du flux hémorroïdal, par l’excès des plaisirs amoureux, par la trop grande sensibilité & l’irritabilité des nerfs, par la suppression de quelque éruption cutanée, par la rétrocession des pustules, & par l’obstruction du foie & des viscères du bas-ventre.

Les grandes hémorragies, les pertes excessives, l’abus des liqueurs spiritueuses, l’usage des alimens grossiers, venteux & de difficile digestion, peuvent déterminer l’affection hypocondriaque, de même que des purgatifs forts & des narcotiques. Elle vient souvent de la suppression subite d’un flux de ventre salutaire, du mauvais traitement de quelque logorrhée ou de quelque fièvre intermittente. Les secours moraux doivent faire la base du traitement destiné à combattre avec quelque succès cette maladie, parce que l’imagination des malades est toujours très-affectée ; mais comme ils ne sont point suffisans, il faut se tourner d’un autre côté & avoir pour objet 1°. d’entretenir le ventre libre ; 2°. de combiner les toniques avec les résolutifs ; 3°. de combattre les symptômes accidentels qui surviennent dans cette maladie.

Nous ne parlerons point de celle qui est produite par un état nerveux général ou particulier aux organes digestifs, mais de celle qui