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sécurité, ou plutôt cette insouciance de la chose publique. Il seroit bien à désirer que la police de Paris, qui a supprimé tous les vaisseaux de cuivre, même étamés, destinés à porter le lait dans cette ville, donnât l’exemple aux magistrats des provinces.

Ce n’est pas dans un seul endroit que le vert-de-gris recouvre les ustensiles en cuivre dont on se sert ; je puis assurer que depuis la partie du Languedoc où l’on cultive les oliviers, jusqu’en Provence, & de Provence jusqu’à Gènes, j’ai vu, mais vu partout les ustensiles destinés à l’huile, chargés de vert-de-gris. J’insiste sur cet objet ; puisse ce que je viens de dire, réveiller l’attention du magistrat sur un danger si évident ! On dira que c’est un infiniment petit dans une grande masse d’huile ; & qu’ainsi il n’est pas dangereux : on trouvera même des apologistes qui s’autoriseront de l’exemple du verdet ; (dissolution du cuivre par l’acide de la rafle du raisin ou du vinaigre) ils diront que ceux qui le fabriquent, tiennent leur pain avec des mains vertes, chargées de la poussière de cette préparation, & qu’ils n’en sont pas incommodés. La couleur plombée de leur teint dément cette assertion ; d’ailleurs, il y a une très-grande différence entre l’activité du poison du verdet, & celle du vert-de-gris, qui est une chaux de cuivre formée lentement & d’une combinaison bien différente de la première.

Suppléer les ustensiles en cuivre par des semblables en bois, ou en fer étamé par le zinc, ne seroit pas plus coûteux, & il n’y auroit plus de dangers à redouter. Ce que je dis sur les vaisseaux de cuivre des provinces méridionales, s’applique très-exactement à ceux dont on se sert dans nos provinces du nord ; ainsi, mon reproche est général ; quelques fabriques particulières sont tout au plus des exceptions en bien petit nombre. Je ne crains pas d’avancer que dans toutes les fabriques où règne la mal-propreté, il est impossible d’avoir de l’huile susceptible d’être conservée aussi long-temps qu’elle auroit pu l’être.

Dans les moulins où l’on travaille pendant toute l’année, (je parle des moulins à graines), une couche de crasse est ajoutée à une autre couche de crasse, & le bois est pénétré à la longue d’une huile qui y rancit au dernier période. Voilà un premier levain sans cesse agissant sur la pâte qu’on travaille. On vient de finir les pressées de vieilles graines déjà ou rances ou moisies ; on apporte ensuite de bonnes graines ; mais à coup sûr l’huile qu’on tirera de celles-ci, ne tardera pas à devenir forte. Comment cela ne seroit-il pas ? l’étoffe de laine qui enveloppera la masse, le moulin qui réduira la graine en pâte, &c, sont encore imprégnés de la première huile rance, qui se communiquera de pressée en pressée. Heureux celui qui fera moudre après ce second, son huile sera moins viciée, mais elle le sera toujours, puisque, d’après l’expérience citée dans le premier Chap. un atome d’huile essentielle suffit pour altérer une assez forte masse d’huile. Passons actuellement à l’attelier de la fabrication des huiles d’olives. Je parlerai de la construction de ses moulins & pressoirs au mot Pressoir.

Une vaste chaudière & son fourneau ; un moulin à peu près semblable à celui dont on écrase les pommes à cidre, un pressoir ; un cer-