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rée, que l’on en retire par des distillations rectifiées, n’est pas l’unique preuve que je donnerai de la présence de cette huile dans les huiles grasses.

Ces huiles déposent par la vétusté ce mucilage, & il y devient alors plus apparent que par leur ustion ; ce qui le démontre encore par la fermentation que subissent les émissions. Séparez les huiles grasses, faites évaporer l’eau ; & vous obtiendrez un mucilage réel.

On peut juger, d’après ce que je viens de dire, que plus ce mucilage est précipité ou extrait, & plus les huiles qui le contenoient précédemment d’une manière mixtive & non simplement agrégative, ont acquis de la rancidité & de l’âcreté ; l’air fixe seul y tenoit le mucilage en dissolution. Ces huiles sont moins consistantes, moins tenaces, épaisses, filantes, & donnent moins de fumée quand on les brûle : en un mot, ces huiles se rapprochent davantage de la qualité des huiles essentielles dont on connoît les goûts âcres & même caustiques, à mesure qu’elles perdent le mucilage qui les adouciroit : c’est l’abondance du mucilage dans l’huile de pavot qui la rend si douce & si détestable pour brûler dans les lampes.

Les semences de colza, de navette, de moutarde, &c., mêlées & appliquées sur la peau d’un homme vivant, sont de vrais épipastiques, (voyez ce mot) ; & même deviennent vésicatoires lorsqu’on réitère & qu’on entretient leur application.

J’ai soumis à la distillation, aux plus légers degrés de chaleur, les graines fraîches de colza, de navette, & de plusieurs autres plantes à siliques. Elles ont donné pour premier produit mobile, des esprits recteurs, ayant l’odeur propre de ces semences. Ce principe est très-âcre au goût, il irrite les yeux & le nez, & c’est celui que l’on remarque dans les cuisines, lorsqu’on fait des apprêts à l’huile échauffée.

Ce principe âcre & volatil des plantes à fleurs en croix, de nature sulphureuse, existe dans le parenchyme de leurs graines, comme le principe amer existe dans l’amande amère, dans la coloquinte, dans la pulpe de l’olive, qui est très-amère. Ces substances fournissent néanmoins des huiles douces.

Les huiles des plantes à siliques ne sont pas épipastiques, comme le marc de leur substance, dans lequel le principe recteur réside particulièrement ; mais elles en retiennent une portion, parce que, dans ces circonstances, les huiles exprimées suivent les affinités & les rapports conséquens à leurs principes, en s’unissant avec cet être volatil que je viens de nommer sulphureux & inflammable. C’est ce principe qui caractérise l’odeur propre & particulière de l’huile de chaque espèce de graine, leur âcreté & leur légère causticité facile à distinguer dans une huile récente & qu’il ne faut pas confondre avec la rancidité.

Dans les distillations que j’ai faites des huiles récentes de colza, navette, &c., avec beaucoup d’eau, je n’ai point cherché à mettre à nu & d’une façon isolée & à part ce principe volatil : les huiles retiennent trop fortement leur esprit recteur. J’ai distillé d’ailleurs au degré de chaleur de l’eau bouillante, & mon objet étoit de connoître si