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CHAPITRE II.

De l’opération de herser.


Doit-on herser après chaque labour, ou simplement après les semailles, soit pour recouvrir le grain, soit pour briser les mottes ? C’est un très-grand problème qu’on ne peut résoudre que par une multitude d’exceptions. Examinons les principales. Je conviens qu’à chaque labourage, si on herse, on n’aura pas des mottes, ou on en aura moins, & la superficie du sol bien aplatie, permettra de mieux sillonner par le labour suivant ; voilà l’avantage de l’opération ; mais n’en résulte-t-il aucun inconvénient ? j’en vois plusieurs. Par exemple, plus la superficie d’un terrain en pente sera unie, & plus il y aura de terre entraînée par la première pluie d’orage. Admettons qu’il n’y ait point d’orage, mais des pluies fines & de longue durée ; les molécules de terre, divisées & séparées par le labour, se réuniront, se taperont les unes près des autres, & le but du labour sera manqué. La même chose arrivera dans la plaine, & arrivera incontestablement toutes les fois que le grain de terre sera tenace, ou ce qu’on appelle terre forte. Il ne pleut pas toujours, il est vrai ; les labours se succèdent d’assez près, je conviens de tout cela ; mais dans une grande métairie, où pour l’ordinaire on n’a jamais que le nombre d’animaux suffisans à la culture, les labours ne peuvent pas être si rapprochés qu’on le pense, & il ne faut que quinze jours d’inconstance dans la saison pour retarder de plus d’un mois les travaux du labourage, puisqu’il faut donner à la terre le temps de ressuyer avant d’y mettre la charrue, autrement elle se lèveroit par bandes, par mottes, & le résultat du travail seroit précisément l’opposé de ce que l’on veut obtenir. C’est donc multiplier les travaux, dans un temps où l’on n’est jamais assez en avance, soit par l’inconstance des saisons, soit par le défaut de bras, soit par le manque de bestiaux surnuméraires. Admettons qu’on ait en son pouvoir la direction des saisons, les bras & les animaux nécessaires, enfin tout ce qu’on peut désirer. Je ne crains pas de dire que l’on manque son but, parce que les labours sont autant pour diviser & ameublir la terre, amener celle de dessous à la superficie, & retourner celle de dessus, que pour présenter au soleil & aux impressions météoriques, la plus grande surface & la plus grande profondeur possibles. Or, si on herse après chaque labour, la seule terre de la surface jouit de ces influences météoriques qui sont le premier & le plus nécessaire des amendement, (Voyez ce mot, & le dernier chapitre du mot Culture). D’ailleurs, la chaleur & la lumière du soleil qu’il faut compter pour beaucoup, pénètrent bien moins une surface plane qu’une surface profondément sillonnée, & dont le rehaussement de chaque côté du sillon forme un abri, (Voyez ce mot & ses effets caractérisés en grand au mot Agriculture, chapitre des abris & des climats ; ces renvois, évitent des répétitions).

Les partisans du hersage prétendent qu’il s’opposer à l’évaporation des principes de la terre, & que cette évaporation augmente en raison de la profondeur & de la largeur des