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qu’elles ne perdent ni leur couleur ni leur odeur. Il n’y a que la dessiccation précipitée qui remplisse cet objet, ainsi que pour les plantes qui n’ont que peu de principes résineux, telles que la mélisse, la bourrache, la véronique, &c. Dans une dessiccation lente elles sont exposées à souffrir un degré de fermentation proportionné à la nature & à la quantité des sucs fermentescibles qu’elles contiennent. Les plantes qui ont ces principes moins abondans, & moins de sucs aqueux, comme la sauge, romarin, perdent moins en séchant lentement, & leur vertu diminue beaucoup lorsqu’on les expose au soleil, ou dans une étuve pour les faire sécher rapidement ».

» Les plantes inodores demandent de la célérité, & les mêmes précautions dans la dessiccation. On doit les exposer dans un lieu bien aéré, autrement l’humidité qui doit s’en séparer, ne s’évapore pas assez vite, il s’y fait de nouvelles combinaisons ; la plante devient noire & pourrit ».

» Les plantes odorantes, desséchées avec promptitude, gardent leur couleur verte, & durent longtemps ; il faut s’attacher sur-tout à conserver leurs parties odorantes ; c’est dans elles que résident les propriétés des végétaux. Doit-on donc les dessécher à l’ombre, dans du papier, & dans un endroit exposé au vent du nord, ou faut-il, pour en obtenir la dessiccation, les exposer au soleil ? Les partisans de la première opinion prétendent que ce dernier procédé prive les plantes de leurs parties actives & odorantes, puisqu’il est établi par plusieurs analyses qu’un degré de feu très-médiocre suffit pour les enlever. Les sectateurs du système opposé répondent que les plantes renfermées dans l’alambic, sont soumises à une chaleur qui agit avec bien plus de force que le soleil auquel on les expose a l’air libre ; mais le premier sentiment paroît préférable à l’autre : il est autorisé par une multitude de faits auxquels il n’est pas possible de résister ».

» Il est des plantes aromatiques qui gardent leur odeur si opiniâtrement, comme l’absynthe, qu’on ne risque pas de les faire sécher à l’air libre ; mais il convient d’envelopper de papier celles dont l’odeur est volatile & foible. Quelques plantes doivent être desséchées avec les fleurs & les feuilles tout ensemble, telles que les menthes, le millepertuis, la germandrée, &c. ; on doit envelopper leurs sommités dans des cornets de papier, en faire de petits paquets ; les lier & les suspendre à l’air. Ces précautions conviennent à toutes les plantes dont les fleurs peuvent conserver leur couleur, comme la petite centaurée ; le rouge se change en jaune, s’il reste exposé à l’air. On peut garder ces herbes bien desséchées près de trois ans sans qu’elles perdent leurs propriétés ».

» Le caillelait à fleurs jaunes doit être exactement desséché en douze heures ; il abonde en miel ; si la dessiccation n’est pas prompte, le miel fermente & devient acide : tous les sucs en sont bientôt altérés ; c’est pour cette raison qu’il fait cailler le lait. Les fleurs du sureau sont à peu près dans le même cas : il faut les faire sécher d’abord après la récolte, si on veut les avoir telles, & l’on ne doit pas attendre qu’elles quittent leurs pédoncules, cette chute ne pouvant