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cultivateur ; les plus redoutables sont le Gribouri de la vigne & le Velours-vert. Le caractère générique de ces insectes, est d’avoir des antennes longues, en forme de fil, composées d’articles alongés & par-tout d’égale grosseur. La forme de son corcelet est hémisphérique, imite le dos d’un bossu, & cache en partie la tête de l’insecte, ce qui lui a fait donner le nom de cryptocephalus, qui veut dire tête cachée. Dans la gravure du mot Insecte, seront représentées les deux espèces dont je vais parler. Comme les autres espèces vivent sur des arbres arbustes forestiers, ou sur des plantes de peu de valeur, il est inutile de s’en occuper.


Gribouri, & dans les provinces Coupe-bourgeon ou Lisette Pique-brot, &c. est classé suivant la méthode de M. Geoffroi, parmi les coléoptères ou insectes à étuis durs, recouvrant le ventre & les tarses ; & parmi les chrysomelles, si on adopte le système de von-Linné.

La description donnée par M. Geoffroi est exacte, & je l’emprunte de cet auteur : « La tête du gribouri de la vigne est noire, renfermée sous son corcelet noir, luisant, bossu, renflé dans son milieu ; son ventre est large & quarré ; les étuis qui le recouvrent, d’un rouge sanguin, & couverts de plusieurs petits poils, ainsi que le corcelet : l’animal en-dessous est noir, & les pâtes alongées, composées de quatre articles. Il le désigne par cette phrase, cryptocephalus niger, élytris rubris ».

Cet insecte sort de terre aux premiers jours du printemps, suivant le climat qu’il habite. Si, après sa sortie, il survient encore des jours froids & nébuleux, les écailles ou débris de l’ancienne écorce de la vigne lui servent de retraite. Si le mauvais temps continue, & si le froid augmente, il abandonne sa cachette, & s’enterre de nouveau jusqu’à ce que la chaleur l’invite à reparoître. J’ai été le témoin de ce petit manège. Son accouplement s’exécute en avril ou en mai, suivant le climat ; il dure plusieurs heures, & même j’en ai vu rester accouplés pendant une matinée entière. Je n’ai pas été assez heureux pour découvrir l’époque de la ponte, ni dans quel endroit l’insecte dépose ses œufs.

Le gribouri se nourrit, au printemps, des premiers bourgeons de la vigne, les cerne, les ronge, les creuse à mesure qu’ils poussent ; & si plusieurs gribouris s’attachent au même bourgeon, il est bientôt séparé du sarment. Quand la vigne a poussé ses sarmens, ses feuilles, sas vrilles & son fruit, cet insecte continue à dévorer les feuilles les plus tendres, & quelquefois l’extrémité de la flèche.

Le gribouri, comme on le voit, détruit non-seulement l’espérance de la récolte prochaine, mais encore il dérange singulièrement celle de l’année suivante. Les boutons qui auroient donné du fruit & un bon bois pour la taille prochaine, sont détruits, ou tellement attaqués, qu’ils restent maigres & étiques, & qu’on ne fait plus, dans le temps, où asseoir la taille du cep ; il sort de toutes parts de faux yeux qui l’affament en pure perte, & qui, dans le besoin, ne peuvent donner du bon bois, que deux ou trois ans