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tiennent à un bois imparfait, & sont peu formés ; ceux du bas sont ordinairement plats, petits, & plus particulièrement destinés à donner des fleurs ou de petites branches à fruit. Il reste donc ceux du milieu des rameaux, & ce sont les bons. On voit, en général, sur les arbres à noyaux, des yeux doubles ou triples ; ceux-ci méritent la préférence sur tous les autres ; les yeux simples sont à rejeter.

Les branches gourmandes ou chiffonnes, fournissent de mauvaises greffes ; il est important de les choisir sur branches saines & déjà à fruit ; mais quels sont les meilleurs rameaux, ou ceux du haut, du milieu ou du bas de l’arbre ? doit-on préférer ceux placés du côté du nord ou du midi, &c. ? Ces questions gravement traitées par plusieurs, pour se donner un ton scientifique, me paroissent bien minutieuses, quoiqu’il soit cependant vrai que les branches du midi & du levant sont, en général, d’une texture plus compacte que celles placées au nord ou à l’ouest, ainsi que celles du milieu de l’arbre, comparées à celles du sommet. Pourvu qu’elle soit saine, bien nourrie, bien aoûtée, cela suffit.

On a encore longuement discuté pour savoir vers quel point cardinal devoit être placé l’écusson sur l’arbre ou sur la branche. Je dis qu’il est impossible d’établir une règle générale pour tout le royaume ; au nord, on a à craindre la froidure ; au midi, le dessèchement de la greffe ; à l’est ou à l’ouest, les coups de vent ou les pluies, &c.

La vraie position tient au climat en général, & en particulier à la situation du jardin ou de l’arbre, mais principalement par rapport à l’abri des coups de vents, & à l’ardeur du gros soleil. Ces effets varient suivant les pays ; ici le vent du nord assure le beau temps, tandis que ceux du midi ou de l’ouest traînent après eux les pluies & les orages ; là, c’est tout le contraire : chacun doit donc étudier la manière d’être de son climat, & greffer ensuite suivant ce que l’expérience aura prescrit.

Il est assez bien prouvé que certains arbres, tels que l’olivier, le châtaignier, le pommier, à cidre sur-tout, &c. donnent en général d’amples récoltes seulement de deux années l’une, & que tous ces arbres ne s’accordent pas pour la même année ; afin de remédier à cet inconvénient, on a imaginé de greffer ces arbres dans l’année, avec l’espèce de l’arbre, dont l’abondance ne concouroit point avec celle du plus grand nombre. Cette heureuse transposition rend les récoltes égales, ou les assure pour l’année où les cultivateurs n’en ont que de médiocres. Cet article mérite la plus grande attention.


CHAPITRE III.

De l’Analogie des Sèves.


Que de romans ou plutôt d’extravagances ont été dites, écrites & répétées. On a vu un pêcher greffé sur un amandier, un prunier, & aussitôt l’on conclud que tous les arbres à fruits à noyaux, pouvoient l’être les uns sur les autres. Les arbres à fruits à pépins, ont également été envisagés sous le même point de vue. Si on consulte les anciens, on