Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1784, tome 5.djvu/350

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

parler de spécifique pour la goutte : s’il existe quelque remède qui puisse mériter ce nom, ce sont les amers. Haller vante beaucoup la gentiane ; Guaven, l’infusion de chamæpitys ; un célèbre médecin de ce siècle, la douce amère. La saponaire, prise pendant un très-long-temps, pourroit peut-être mériter le nom de spécifique : cette plante, par sa vertu fondante, ne peut produire que des effets très-salutaires ; on ne sauroit trop en recommander l’usage.

L’électricité peut convenir dans la contracture des membres ; mais il ne faut point exposer le malade à des coups foudroyans, à une commotion générale & trop forte. Il faut observer quels sont les muscles qui souffrent, & qui ont perdu le ressort & le mouvement, & en tirer des étincelles, selon leur direction : il faut, d’un autre côté, appliquer des fomentations émollientes, des vapeurs d’eau chaude aux muscles antagonistes. Ces remèdes servent très-bien à modérer leur force tonique augmentée : mais avant d’exposer les malades à l’électricité, il faut les préparer par des moyens propres à les rendre moins sensibles aux secousses qu’elle procure. M. AM.

Lorsque l’on est continuellement attaqué de la goutte, sur-tout lorsqu’elle est irrégulière, & qu’elle se jette tantôt sur la poitrine, sur l’estomac ou sur tel autre viscère, le remède le plus sûr, le plus efficace, & que l’expérience a démontré être le plus salutaire pour en prévenir les retours, est d’appliquer un cautère à une ou aux deux jambes, & d’avoir le plus grand soin de l’entretenir. Une personne raisonnable ne peut mettre en parallèle le petit assujettissement que ce remède exige chaque jour, avec les douleurs inouies, & de-là le danger éminent de perdre la vie par une goutte remontée.


Goutte sereine, Médecine rurale. C’est la privation de la vue sans cause apparente, ni vice sensible dans le globe de l’œil. La pupille néanmoins est plus dilatée que dans l’état naturel.

On distingue deux sortes de goutte sereine ; l’une est parfaite, & l’autre imparfaite. Dans la goutte sereine parfaite, on n’aperçoit aucun rayon de lumière : dans l’imparfaite, on ne distingue aucun objet d’une manière sensible, mais seulement la lumière des ténèbres.

La goutte sereine parfaite est regardée comme incurable, sur-tout si ceux qui en sont attaqués, sont dans un âge fort avancé, & si elle est le produit de quelque longue maladie. Il n’en est pas de même de imparfaite ; elle est toujours susceptible de guérison.

Les signes avant-coureurs de cette maladie sont le vertige, des éblouissemens, des maux de tête, un tintement d’oreille, de fréquentes fluxions aux yeux, la foiblesse de l’organe de la vue, un assoupissement extraordinaire.

Cette maladie est subordonnée à une infinité de causes ; elle peut dépendre d’un reflux d’humeurs sur l’organe de la vue, de la suppression du flux hémorroïdal, de la répercussion des dartres invétérées, d’une abondance de sang dans les vaisseaux du cerveau.

Elle peut être encore l’effet d’une fièvre maligne, de quelque coup