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autre erreur. Rien d’indéterminé, quoique cette détermination nous soit inconnue : à peine connoissons-nous l’extérieur, l’écorce des objets qui nous environnent, & nous voulons calculer ce qu’il y a de plus caché. Écoutons M. Bonnet dans sa Considération sur les Corps organisés : « Nous ignorons absolument quels sont les derniers termes de la division de la matière, & c’est cette ignorance même qui doit nous empêcher de regarder comme impossible l’enveloppement des germes les uns dans les autres. Nous n’avons qu’à ouvrir les yeux, & à promener nos regards autour de nous, pour voir que la matière a été prodigieusement divisée : l’échelle des êtres corporels est l’échelle de cette division. Combien la moisissure est-elle contenue de fois dans le cèdre, la mite dans l’éléphant, la puce d’eau dans la baleine, un grain de sable dans le globe de la terre, un globule de lumière dans le soleil ! On nous prouve qu’une once d’or peut être sous-divisée par l’art humain en un fil de 444 lieues de longueur ; on nous montre à un microscope des animaux dont plusieurs milliers n’égalent pas ensemble la grosseur du plus petit grain de poussière ; on fait cent observations du même genre, & nous traiterions d’absurde la théorie des enveloppemens ! Il y a plus : on observe, pour ainsi dire, à l’œil cet enveloppement ; on découvre dans un oignon d’hyacinthe jusqu’à la quatrième génération ; & ce qu’il y a de très-remarquable, c’est que les parties de la fleur sont celles qu’on distingue le mieux dans la troisième & quatrième génération ; le volume de ces parties paroît incomparablement plus grand que celui de toutes les autres parties prises ensemble. »

On peut donner des preuves directes de l’emboîtement dans les deux règnes. L’abbé Spallanzani a vu distinctement dans le volvox animalcule des infusions, jusqu’à la troisième génération. D’autres observateurs ont été plus loin, puisqu’ils y ont découvert jusqu’à la cinquième, & même jusqu’à la sixième génération ; & toutes ces générations emboîtées les unes dans les autres se développoient successivement, suivant certaines proportions.

Les végétaux nous offrent de semblables preuves : outre l’exemple de l’hyacinthe, il suffit de jeter les yeux sur un arbre, de réfléchir un instant, & l’on y apercevra la réalité de l’emboîtement. En effet, les branches & les rameaux ne sont que des générations annuelles qui étoient originairement emboîtées les unes dans les autres ; toutes étoient contenues dans la maîtresse tige ; celle-ci dans la graine, qui elle-même faisoit partie d’un arbre. Cet arbre avoit été pareillement existant dans un autre par le même mécanisme, & ainsi de suite il est facile de remonter jusqu’au premier arbre.

L’idée de l’emboîtement des germes, qui semble si singulière au premier coup-d’œil, mieux étudiée & plus approfondie, paroît, après un examen sérieux, être le vrai secret de la nature.

§. III. De l’évolution. On a donné, dans ce système, le nom d’évolution au passage qui conduit le germe à l’état de perfection qui est propre