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le germe au mâle, & la découverte des animalcules spermatiques semble décider la question ; on les a trouvés dans presque toutes les semences, on a cru leur voir un mouvement, une vie propre, & de-là on a conclu qu’ils étoient les germes que le mâle déposoit dans la femelle, qu’ils y subissoient des métamorphoses analogues à celles du têtard, & l’animal comme le végétal ont été formés par les animalcules spermatiques.

Tout ce brillant appareil a disparu aux yeux d’observateurs plus exacts ou meilleurs logiciens ; ces animalcules n’ont pas été observés dans tous les animaux, & les autres sont rentrés dans la classe qui leur appartenoit & ont cessé de présider à la génération.

Suivant le système que nous développons ici, le germe existe dans la femelle, pour les espèces qui ont besoin du concours du mâle & de la femelle pour la reproduction. Non-seulement le raisonnement l’y suppose, mais l’expérience l’y démontre. M. l’abbé Spallanzani a vu des plantes femelles de l’espèce de citrouille nommée cucurbita melopepo fructu clipeiformi ; celles de l’épinard, du chanvre, produire des graines, sans aucune action des étamines ; or, il n’y a pas de graine sans germe préexistant : il faut donc en conclure que le germe se trouvoit placé dans la plante femelle. Le règne animal en est une preuve non moins évidente ; le jaune est la partie essentielle de l’œuf, celle qui contient le germe & le poulet ; mais tout le monde sait que le jaune existe dans l’œuf non fécondé ; ainsi, dans les ovipares on est assuré que le germe appartient à la femelle.

Quoique nous ne parlions ici que du germe de la graine, il ne faut pas conclure qu’il soit unique dans la plante ; il est plus vrai de dire, au contraire, qu’une infinité de germes est répandue dans tout le corps de la plante, puisqu’il n’est presque point de partie de la plante qui ne puisse donner naissance à des boutons, à des branches, ou à des racines ; la feuille même dans laquelle se rencontrent des vaisseaux propres, des fibres ligneuses, des trachées, des utricules, &c., peut produire de bouture une petite plante qui, par la suite, donnera des fleurs & des fruits ; pour que cette production ait lieu, il faut donc que la feuille contienne les germes nécessaires. Ces germes ont une véritable vie qu’ils ont reçue au moment de la première fécondation ; cette vie les met en état de végéter & de produire de nouveaux germes, ou plutôt de les mettre à découvert & de les offrir au stimulus qui doit un jour les animer.

§. II. De l’emboîtement des Germes. Dans le système que nous avons adopté, & qui sert de base à toutes nos explications, nous supposons que tous les germes sont renfermés les uns dans les autres, à peu près comme de petites boîtes dans de plus grandes : mais cet emboîtement, jusqu’où va-t-il ? Reconnoît-il des termes, ou l’infini l’accompagne-t-il ? Gardons-nous de le croire : l’emboîtement à l’infini seroit une supposition absurde ; tout est fini dans la nature, & quand on appuieroit l’emboîtement à l’infini sur la divisibilité de la matière à l’infini, ce ne seroit que défendre une erreur par une