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l’usage des sucs ou des infusions, de cresson de fontaine, de beccabunga, de moutarde, &c.

Mais dès que les symptômes de la gangrène se manifestent, & qu’ils font des progrès, on a recours au quinquina ; on joint à son usage celui des astringens, & sur-tout si les accidens sont pressans, celui de l’acide vitriolique, dont l’effet est prompt & sûr.

On conclura de ce qui vient d’être dit, que la pourriture est une des causes éloignées de la gangrène, soit qu’elle attaque les parties externes, soit qu’elle ait son siège dans les premières voies, ou dans la masse du sang. Dans ce dernier cas, les cadavres des animaux qui succombent à la putridité fébrile du sang, se corrompent en peu d’heures, ils enflent prodigieusement ; lorsqu’on en fait l’ouverture, ils répandent une infection qui est affreuse ; le sang contenu dans les gros vaisseaux, est dans un état de dissolution manifeste ; on trouve des épanchemens dans la tête, dans la poitrine & dans la cavité de l’abdomen ; plusieurs viscères sont couverts de taches gangréneuses, plusieurs se mettent en lambeaux sous les doigts ; les uns sont en suppuration, les autres sphacélés ; le cœur & le foie sont d’un volume extraordinaire, &c. Tel est le précis des funestes ravages qu’opère la putridité fébrile du sang, dès qu’elle est parvenue à son dernier degré.

Enfin, la cure des gangrènes humides produites par les contusions, l’étranglement, l’infiltration, les inflammations, la brûlure & la morsure des bêtes venimeuses, consiste à diminuer l’engorgement, 1°. par la diète, les boissons liquides résolutives, & par des saignées réitérées ; 2°. par des scarifications qui doivent pénétrer tantôt jusqu’au tissu cellulaire, tantôt jusqu’aux muscles engorgés, selon le siège du mal.

Alors le chirurgien vétérinaire doit opérer de manière à procurer l’évacuation totale des sucs corrompus, & à emporter les chairs qui ne sont pas en état de pouvoir être revivifiées. Il peut encore réduire les chairs en escarres par le feu, l’huile bouillante, l’huile de térébenthine, par les esprits acides concentrés seuls ou dulcifiés avec l’esprit de vin, & employer ensuite les antiseptiques, les résolutifs, & les suppuratifs si la partie est menacée d’une gangrène superficielle ; mais si elle est profonde & que la corruption des os & des membres soit si grande qu’il n’y ait point d’espérance de résoudre l’engorgement, ses soins resteront sans succès, à moins que le propriétaire n’aime mieux se conserver un animal inutile, ayant un membre ou une portion de membre de moins ; alors il auroit recours à l’amputation. J’en ai vu un exemple. Un faon apprivoisé, dont le boulet d’une des extrémités antérieures, fut attaqué d’une gangrène humide, en conséquence d’une violente luxation qu’il s’étoit faite ; les os qui formoient le boulet, n’étoient presque plus unis que par les ligamens, toutes les parties molles qui les couvroient, étoient non-seulement dépourvues de tout sentiment & de toutes actions organiques, mais la dissolution putride dont elles étoient attaquées, exhaloit une odeur vraiment cadavéreuse. La personne chargée de éducation du jeune faon, s’ap-