Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1784, tome 5.djvu/233

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

autres sur lesquels il y avoit encore quelques traîneuses. » L’auteur cite encore plusieurs traits semblables.

M. de la Bretonnerle s’est-il servi d’une très-forte loupe pour examiner les yeux tendres & nouvellement en sève dont il parle ? car l’oeil nu ne sauroit découvrir les galle-insectes lorsqu’ils sortent de l’œuf, & ces yeux à demi-dévorés par les fourmis, pouvoient encore en être couverts, & s’il n’en existoit point, ces yeux étoient-ils sans miellat ? Ces deux points méritent d’être examinés de nouveau. Quant à moi, je puis assurer que je n’ai jamais vu des fourmis sur les arbres, que lorsque l’une ou l’autre de ces causes les attiroit, auxquelles il faut encore ajouter le puceron, (Voyez le mot Cloque) & peut-être plusieurs autres insectes qui occasionnent l’extravasement & le suintement de la sève.

Comme les galle-insectes multiplient à l’excès, ils couvrent bientôt les bourgeons & les feuilles, surtout par-dessous ; de manière que, soit par le dessèchement de la sève, soit par la multiplicité, par celle de leurs excrémens, enfin par la poussière entraînée par le vent qui s’attache sur ces matières visqueuses, les feuilles & les bourgeons paroissent presque noirs ; on remarque principalement cette couleur sur les orangers & sur les arbres à fruits sucrés, tels que le mûrier, la vigne en espalier, le cerisier, pêcher, abricotier, &c.

M. de la Bretonnerie a raison de dire que les fourmis ne tuent ni les pucerons ni les galle-insectes ; chacun de ces insectes vit tranquillement à côté l’un de l’autre. La fourmi vit de la sève extravasée après la piqûre du puceron & du galle-insecte, & ceux-ci de la sève qu’ils pompent par leur piqûre.

On conçoit parfaitement que des plaies multipliées à l’infini, sans cesse renouvelées sur des bourgeons pleins de sève, & que la déperdition de substances, doivent à la fin épuiser le bourgeon, la feuille, &c. ; enfin, qu’ils doivent se dessécher, & l’arbre languir : c’est ce qui arrive.

Les amateurs de recettes en ont proposé mille & mille, & leur multiplicité prouve combien elles sont infructueuses. Toujours des infusions de plantes amères ou fétides, des lessives chargées de chaux, de suie de cheminée, de cendres & d’autres ingrédiens, des dissolutions de savon dans l’eau, &c. Je ne connois qu’une bonne recette : c’est, avant d’entrer les orangers dans la serre, ou après avoir taillé les autres arbres, de s’armer de patience, & avec un pinceau rude, & sans cesse trempé dans le vinaigre, de frotter à plusieurs reprises toute la superficie des branches, des feuilles en dessus & en dessous, & de se hâter d’emporter les bois coupés, pour les jeter au feu. On répétera la même opération sur les orangers, en les sortant de la serre. Le vinaigre fait périr la cochenille, le kermès & la galle-insecte, &c. ; mais pour qu’il agisse sur ce dernier, il faut qu’il ne soit plus collé sur le bourgeon ou sur la feuille, attendu que le vinaigre couleroit impunément sur son enveloppe qui a la forme d’un bouclier. On peut encore, après cette opération & avec des seringues, laver à grande eau les branches &