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quelques essais ont constaté que dix-neuf degrés de chaleur suffisoient pour faire mourir cet insecte, lorsqu’il se trouvoit sans grain, & simplement renfermé dans un sac de papier : de-là on a conclu que l’étuve devoit beaucoup plus promptement opérer cet effet, elle dont la chaleur étoit deux ou trois fois plus considérable, en sorte que ce moyen devoit avoir la préférence sur le crible & sur les odeurs fortes ; mais l’expérience n’a pas confirmé la conjecture. »

» Il y a une vingtaine d’années qu’on fit construire, au parc de Vaugirard, une étuve, dans l’intention d’y conserver une certaine quantité de froment, pour une année de l’approvisionnement de l’école militaire ; le grain, acheté en Brie, étoit cependant médiocre & déjà rempli de charançons : c’étoit une belle occasion de pouvoir démontrer le double avantage de l’étuve ; aussi fut-elle saisie avec empressement. Qu’en est-il arrivé ? c’est que les charançons, que la chaleur attaquoit, se réfugièrent aux extrémités de l’étuve & dans les endroits où la chaleur étoit moins considérable. On auroit cru ces insectes morts, tandis que le plus grand nombre étoit resté dans une espèce d’engourdissement qui en imposa sur leur état vivant. Dans cette persuasion, on demeura tranquille sur le compte de ce froment, & on le renferma dans des caisses ; mais les charançons, au retour de la belle saison, se réveillèrent & renouvelèrent leur ravage comme à l’ordinaire. »

» Des expériences plus récentes ont démontré qu’en donnant à l’étuve quatre-vingt degrés de chaleur au lieu de soixante-dix, il y avoit, à la vérité, des charançons qui périssoient, mais qu’il falloit nécessairement pousser jusqu’à quatre-vingt-dix degrés, pour que ces insectes, vieux ou jeunes, succombassent entièrement. Le malheur est qu’une semblable chaleur dessèche trop le froment, & le torréfie. »

M. Parmentier annonce d’une manière positive que le four mérite la préférence sur l’étuve. Il s’explique ainsi.

« Pour détruire les insectes mêlés & confondus dans le froment, il suffit de mettre ce grain dans le four, deux heures après que le grain en est retiré, & de l’y laisser jusqu’au lendemain à la même heure. On est assuré qu’il n’éprouvera point alors une chaleur capable d’altérer aucun de ses principes, & que les œufs, les vers, les chenilles, les chrysalides & les papillons seront parfaitement détruits. »

Les académiciens (cités dans le premier Chapitre de cette Seconde Partie) se servirent du four avec succès lorsqu’ils y exposèrent les grains attaqués, dans une espèce de claie faite en bateau. J’ai cherché moins d’appareil ; après avoir fait nettoyer le four le mieux qu’il a été possible, je l’ai presque rempli de grains chargés de peu de charançons à la vérité, mais de beaucoup de fausses teignes, & tous les insectes périrent. Du blé semblable & non passé au four s’échauffa beaucoup dans le grenier, & fut criblé par les papillons : la première fournée de ce blé conserva une odeur un peu désagréable, mais j’eus soin pour la suivante de faire ouvrir quelquefois & pendant quelques minutes chaque fois la porte du four, l’odeur forte se dissipa, & il n’en resta plus dans le