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fement, car les blés charançonnés ou attaqués des mites, sont très-susceptibles de s’échauffer. Si les charançons fuient, où se retireront-ils ? contre les murs, dans les gerçures des murs, des bois, &c. ou bien ils s’envoleront par les fenêtres ; à moins que vous ne les détruisiez pendant qu’ils grimpent contre les murs ; l’opération est inutile, puisqu’ils ne tarderont pas à sortir de leur retraite, ou rentreront par où ils seront sortis. Remuez souvent votre blé ; établissez le plus qu’il sera possible de grands courans d’air. C’est en quoi consiste la vraie méthode, sur-tout si vos greniers sont construits comme il sera dit ci-après.

§. II. Des fausses Teignes.

De tous les ennemis du froment, de l’orge, de l’avoine, & même du seigle, les plus redoutables sont les fausses teignes. Ce dangereux insecte est heureusement peu connu dans le nord du royaume ; il est fort multiplié dans les provinces du centre, & beaucoup dans celles du midi. Ses ravages commencent dans l’épi, même encore sur pied, se continuent dans les gerbiers, & se propagent d’une manière terrible dans les greniers, où leur multiplication ressemble beaucoup à celle du charançon, suivant le degré habituel de chaleur du climat.

MM. Duhamel & Tillet, de l’Académie royale des Sciences de Paris, furent, en 1760, envoyés par le gouvernement dans l’Angoumois, afin d’y constater, de prévenir & d’arrêter les funestes dégâts que ces insectes faisoient dans les blés de cette province. Je vais profiter de l’excellent travail de ces deux académiciens, & après avoir suivi pas à pas & vérifié toutes leurs observations, je puis dire qu’elles décèlent les naturalistes les plus instruits & les plus exacts. Enfin, c’est avec la plus grande satisfaction que je paie ce tribut de louanges à la mémoire du premier, que l’agriculture a eu le malheur de perdre, & au second, dont tous les travaux sont sans cesse dirigés vers le bien public. Ce que je vais dire est le précis de leur mémoire, & pour le bien comprendre, il est important d’avoir sous les yeux la figure des fausses teignes dans tous leurs états, pour observer de quelle manière elles attaquent les blés. Comme il n’est pas facile, dans les campagnes, de se procurer les Mémoires de l’Académie, je crois faire plaisir à mes lecteurs d’en emprunter les gravures.

Explication de la Planche IX.
Fig. 1. Épi de blé barbu, sur lequel sont posés des papillons, & autour desquels d’autres voltigent ; aa, papillons disposés à pondre ; b, chenille nouvellement éclose, qui pend à un fil de soie très-fin ; cela arrive rarement.
Fig. 2. Balle de froment de grandeur naturelle ; on apperçoit dessus, & en c, quelques œufs de papillons.
Fig. 3. La même balle très-grossie au microscope ; c, quatre œufs.
Fig. 4. Traînée d’œufs, dans la position où les papillons les jettent quelquefois.
Fig. 5. Les mêmes œufs grossis au microscope. Les œufs marqués D sont pleins ; les chenilles sont sorties des œufs marqués E.
Fig. 6. Groupe d’œufs, dont quelques-uns contiennent des chenilles, & d’autres sont vides.
Fig. 7. Un œuf vu très-en-grand, dont la membrane est sillonnée, & présente de légères ondes.