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les poussières des étamines sont délayées, dissoutes, entraînées, en sorte que le froment qui n’a pas été fécondé demeure petit & vide.

Quand le froment est encore vert, s’il survient tout à coup de grandes chaleurs, la tige, au lieu de grossir, se dessèche, les grains mûrissent trop promptement, ils n’ont pas le temps par conséquent de se remplir suffisamment de farine.

L’expérience ne prouve encore que trop souvent que la grêle peut occasionner des dommages au froment, en hachant les épis & produisant dans la pièce où elle se répand, un froid glacial qui suspend pendant un temps la végétation, pour laquelle il faut une chaleur douce & continue.

Les vents impétueux occasionnent aussi un tort considérable au froment, en le faisant verser ; la tige, plus ou moins ployée, souffre une espèce d’étranglement ; la sève interrompue dans son cours, ne monte plus jusque dans l’épi, & le grain, s’il n’est pas encore bien avancé, prend peu de nourriture, & est imparfait.

Tous ces grains, ordinairement menus, chétifs & ridés, ont chacun des signes qui décèlent l’espèce d’accident arrivé à leur végétation : ils portent différens noms dans le commerce ; on les appelle blés échaudés, blés retraits, blés maigres, blés coulés, blés stériles, & blés versés.

On sait encore qu’une pluie froide continuelle, pénétrant jusque dans la texture du grain en lait, se combine avec ses parties constituantes, leur fait occuper plus de volume, d’où il résulte que le froment est assez gros, mais léger, à cause de l’abondance de son écorce & de la petite quantité de farine, qui n’est pas de garde.

Enfin, si cette pluie dure plus longtemps, qu’elle se prolonge jusqu’au moment & même après la moisson, le froment, au lieu de se perfectionner dans la gerbe & d’achever sa maturité à la grange, germe & se gâte au milieu des champs.

Il est donc certain que dans le petit nombre d’accidens qui viennent d’être décrits très en abrégé, on reconnoît visiblement l’influence de l’atmosphère ; on voit que la constitution de l’air, la chaleur, le froid, l’humidité, la distribution des pluies en certaines circonstances, la force, la direction & la durée des vents, augmentent, diminuent ou anéantissent le produit de nos récoltes : mais que certains brouillards du printemps occasionnent, comme on le prétend, la rouille, cet accident qui survient en un clin-d’œil au froment, avant & après la formation de l’épi : c’est ce qui paroît bien difficile à concevoir. Entrons dans quelques détails à ce sujet, cet accident étant un des plus redoutables du froment, & affectant également presque tous les graminés ainsi que beaucoup d’autres végétaux.

Section II.

De la Rouille.

C’est un accident, & non une maladie, qui survient presque toujours, aux plus beaux fromens, & à l’instant précisément on ils sont dans une vigoureuse végétation. Les écrivains sacrés & profanes de l’antiquité en ont fait mention sous le nom de rubigo, la rouille ; disons un mot sur