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toutes les façons dont on se sera pu aviser, ç’aura été pour néant, s’il n’y échéoit rencontre de bonne saison en l’ensemencement provenant du tempérament de sécheresse & d’humidité, selon le particulier naturel des grains, plus ou moins les uns que les autres. Moyennant lequel fond se trouvant humecté par les précédentes pluyes & esventé par le beau tems présent, sec & serain, se rend propre à recevoir les semences, pour facilement germer, tost lever & sortir de terre sans estre exposé à la merci des fourmis, vermines & autres bestioles qui les y rongent ; & ce, avec autant plus d’intérest que plus demeurent à naistre & ne seront suffoquées des méchantes herbes, qui par le labeur arrachées de terre, ne s’y pourront reprendre à faute d’humeur. Autre chose ne nous peut faire jouir de ce rencontre que la diligence, pour avec elle prendre par les cheveux le vrai point de la bonne saison des semences, les expédiens avec toute extrémité de labeur ; craignons que les pluies de l’automne, survenant sur l’ouvrage, ne nous renvoyant trop loin dans l’hiver & par tel destruc nous fassent choir en grande perte. » L’antiquité dit là-dessus :

Si tu veut bien moissonner,
Ne crain de trop tost semer.


« Dont sommes poussés à avancer nos semences avec espoir de profit. Les meilleurs messagers, instruits par longues expériences, méprisent les tardives semences, quoique fructueuses, souhaitant leur rapport estre brûlé pour l’exemple, afin que leur fertilité n’anochalisse le laboureur. Car c’est chose autant rare d’en avoir bonne issue, que mauvaise des hastives faites en saison, & favorisées du tems suivant. C’est néanmoins selon la faculté des terroirs & climats, voulants plutost ou plus tard être ensemencés les uns que les autres ; il vaut mieux s’avancer que de reculer à jetter les semences en terre. »

» Les premières feuilles des arbres chéans d’elles-mefmes en l’automne, nous donnent avis de l’arrivée de la saison des semences ; les araignes terrestres, aussi par leurs ouvrages, nous sollicitent à jetter nos bleds en terre ; car jamais elles ne filent en automne que le ciel ne soit bien disposé à faire germer les bleds de nouveau semés ; ce qu’aisément se cognoist à la lueur du soleil qui fait voir les filets & toiles de ces bestioles, traversser les terres en rampant sur guérets. Instructions générales qui peuvent servir & estre communiquées à toutes nations propres à chacun climat chaud, froid, tempéré, provenant directement du bénéfice de nature, qui par ces choses abjectes & contemptibles sollicitent les paresseux à mettre la derniere main à leur ouvrage, sans user d’aucune remise ni longueurs. Six semaines y a-t-il eu de bons tems pour les semences, & non gueres davantage, commençant ez lieux tempérés le 15 septembre & le 10 du commencement d’octobre, lesquels où la plus part se rencontrant au décours de la lune, se rendront du tout propres à cette action : selon la commune opinion des bons laboureurs, qui, par excellence, appellent ce terme-là de l’année, la