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lait pendant neuf à dix heures, & il se caillera. Préparez des formes semblables à des boîtes à dragées, que vous mettrez sur de la paille ; vous les garnirez avec un linge bien blanc & bien fin. Placez dans ces vaisseaux le lait caillé qu’on lève du pot avec une cuiller plate ; laissez reposer & asseoir le lait caillé jusqu’à ce qu’il ne rende plus de petit lait ; ensuite salez ce fromage sur toute la superficie ; 24 heures après retournez-le sur un autre petit paillasson, & vous salerez également le côté qui ne l’a pas été ; enfin vous enlèverez la toile fine, qui a servi à égoutter le lait.

Laissez le sel fondre sur ce fromage, & ayez soin de le retourner tous les jours sur des paillassons bien secs & bien propres, que vous rangerez sur des claies. Si le sel est noir, roux, &c. il tache le dessus des fromages ; il suffira de le laver avec de l’eau fraîche qui enlèvera ces maculatures.

Un point essentiel est de tenir les fromages dans un endroit tempéré, où ils ne sèchent ni trop tôt, ni trop lentement. Quand ils seront secs, si on veut les manger gras, il faudra les mettre dans des assiettes rondes que l’on abouchera l’une sur l’autre, & on aura soin chaque jour de renverser les assiettes, c’est-à-dire, que celle qui aura servi de couvercle pendant un jour, deviendra le lendemain le vaisseau qui supporte le fromage, & ainsi tour-à-tour.

Si vous voulez raffiner le fromage, trempez-le, quand il est bien sec, dans du vin blanc, & mettez-le de nouveau entre deux assiettes. On peut le couvrir alors avec du persil, mais en petite quantité. On est le maître par ce moyen de l’avoir au point de raffinement qu’on le désire ; il suffit pour cela de le tremper de temps en temps dans du vin blanc.

La présure se fait avec du vin blanc sec, dont on prend une pinte, sur laquelle on ajoute deux verres de bon vinaigre blanc, environ une once de sel de cuisine, & un morceau de vessie de cochon séchée. On peut augmenter une seconde fois cette dose, quand le pot est à moitié.

N’y auroit-il pas erreur dans ce procédé qui nous a été communiqué. Au lieu de vessie de cochon ne doit-ce pas être de caillette ? Si c’est effectivement de vessie, je ne vois pas à quoi elle peut être utile, puisqu’elle ne contient point d’acide ; en ce cas le vinaigre & le vin blanc forment à eux seuls la présure.

La chèvre exige la plus grande propreté dans son étable, & cette propreté influe sur son lait. Il faut donc nettoyer l’étable tous les jours, la pourvoir d’une litière fraîche, pendant l’hiver comme pendant l’été si elle ne sort point de l’écurie. On doit les faire boire soir & matin, & de temps à autre leur donner du sel, il est très-avantageux de faire cuire des herbes potagères à demi, & de les leur donner avec l’eau dans laquelle elles sont cuites. Les chèvres nourries à l’écurie, donnent plus de lait que celles qui vont paître. Dans plusieurs provinces il est avec raison défendu de les laisser sortir, & les particuliers ont le droit de les tuer s’ils les trouvent sur leurs fonds. La dent de cet animal est un vrai destructeur des taillis, des pousses qu’elle attaque. Les chèvres ne sortent jamais au Mont-dor, & cependant les fromages y sont délicieux.